Abbildungen der Seite
PDF
EPUB

moyen âge, se compose de deux parties : la cité où l'on se réfugiait prudemment derrière de bons remparts quand on craignait les chances de la guerre ; et le faubourg qui s'étendait avec un peu plus, de confiance dans la campagne, quitte à être pillé et saccagé de temps à autre. L'église de la cité, Notre-Dame, assez insignifiante du reste, offre une particularité qui mérite d'être notée ; c'est une petite chaire gothique, en pierre ciselée, accolée extérieurement au flanc de l'église, et d'où l'on venait prêcher le peuple assemblé en plein air sur le parvis. Il y a là l'indication d'un usage entièrement perdu depuis long-temps et dont ailleurs on ne trouve guère de traces.

Dans l'église du faubourg, qui paraît dater du quinzième siècle, je remarquai une assez belle tombe de grès (celle du chanoine de Grandmesnil), qui a conservé les couleurs dont elle était peinte autrefois. On sait qu'au moyen âge et jusqu'à la renaissance on revêtissait d'azur et de pourpre et on rehaussait d'or non seulement les statues, mais les portails et les décorations intérieures des églises, ce qui, en les mettant en harmonie avec les vitraux, devait produire des effets d'une grande richesse.

En circulant dans les rues de la ville nous retrouvâmes pendus à la porte des bourreliers, à côté des bâts et des harnais pour les chevaux, grand nombre de ces peaux de biques que les gens de ce pays aiment à porter, tous les poils en dehors, à la manière des sauvages. Ce ne sont après tout que des espèces de paltots on ne peut plus imperméables, qui les couvrent entièrement de la tête à la moitié des cuisses et les garantissent fort commodément de la neige en hiver et de la pluie en été.

Les vieux Gaulois aussi, rapporte César, étaient vêtus du sayon de peau de chèvre. Il est vrai que pendant leur long asservissement sous la domination romaine beaucoup d'entre eux, et surtout les peuplades méridionales, avaient adopté, avec les mœurs du vainqueur, les modes efféminées et appris, à se filer de souples tuniques de fine laine; mais l'histoire rapporte aussi que, honteux de s'assujétir à des modes qui n'avaient pas été celles de leurs pères, les rudes habi

tans de l'Armorique continuèrent obstinément à se vêtir de peaux de bêtes fauves, et, comme l'on voit, leur persévérance a traversé quinze siècles sans broncher. Aujourd'hui cet usage est encore tellement répandu dans ces provinces qu'il n'est pas rare de voir les gens aisés même se couvrir à la chasse et en voyage de peaux de loups et d'ours, et en sortant de Vitré je ne fus pas peu surpris de rencontrer un magnifique lion à la crinière flottante qui trottait à cheval de la manière la plus fantastique. On me dit que c'était un bon médecin des environs qui faisait son inoffensive tournée.

J'avais pour ciceroni, dans Vitré, deux jeunes habitans de la ville, MM. de L..... remplis d'une si aimable érudition et d'une obligeance si cordiale que je ne puis m'empêcher d'en noter en passant l'agréable souvenir. Au-dessus des anciens fossés de la ville, ils me firent remarquer une maison grise au grand toit d'ardoise, accompagnée d'une vieille tour.

Cette tour, c'est la tour de Sévigné; ce logis, celui où descendait l'aimable marquise quand elle venait voir à Vitré madame de Chaulnes et messieurs des États, et rire un peu de ce prochain de Bretagne qu'elle trouvait si plaisant surtout quand il avait dîné; mais qu'elle aimait cependant lorsqu'elle écrivait à sa fille la provençale : J'aime nos Bretons ; ils ‹ sentent un peu le vin; mais votre fleur d'orange ne cache pas de si bons cœurs, ›

Le château qu'elle habitait, ce célèbre château des Rochers d'où elle datait ses lettres, n'est qu'à une lieue de Vitré. On nous amena des chevaux et nous voilà parti pour les Rochers.

Le nom donné à cette habitation n'est en vérité pas démenti par les chemins qui y conduisent: nous les trouvâmes rocailleux plus qu'on ne peut l'imaginer; mais, ni mes compagnons de voyage, ni les petits poneys bretons qu'ils mon→ taient n'avaient l'air d'y prendre garde le moins du monde. Nous trottions indifféremment à travers tout ce qui se présentait et volions comme par enchantement par dessus des trous et des quartiers de roches dont la vue seule eût fait frémir les purs-sang du bois de Boulo

gne. Nous gagnâmes ainsi une petite chaussée qui date du temps où madame de Sévigné écrivait: Les chemins de Vitré ici sont devenus si impraticables ‹ qu'on les fait raccommoder par ordre du roi et de M. de Chaulnes : les bour‹ biers sont enfoncés, les hauts et bas plus hauts et bas que jamais. Tous les paysans de la baronnie y seront lundi. A coup sûr les paysans de la baronnie n'y sont pas retournés depuis : les énormes pavés ne tiennent plus ensemble; c'est une sorte de barricade continuelle. Nous n'en continuâmes pas moins notre allure légère, de sorte qu'en un rien de temps nous arrivâmes comme un tourbillon devant la grille du château de madame de Sévigné.

Ce château, bien qu'il soit habité, entretenu et recrépi de temps en temps, paraît ne pas avoir trop changé de physionomie depuis quelques cents ans. Il est formé de la réunion irrégulière et incorrecte de constructions de plusieurs époques liées entre elles par des tourelles, et sans être ni grand ni imposant, il a tout ce qu'il faut pour bien répondre aux souvenirs qu'il rappelle.

Avec quel intérêt plein de charme nous le visitâmes! Comme nous interrogions ces vieux murs, ce grand escalier, cette chambre où l'on conserve son portrait, ainsi qu'un vaste lit de satin brodé aux Indes, d'or, d'argent et de soie de plusieurs couleurs, et ce cabinet où elle se retirait souvent pour écrire, où elle aimait à se renfermer en la compagnie de saint Augustin, qu'elle lisait en latin; de Nicole, de Pascal, de ces MM. de Port-Royal, et où venait la surprendre en riant la gouvernante de Bretagne, suivie de ce fou de Pomenars, suivi de la Murinette-beauté.

Nous parcourûmes aussi cette grande cour d'honneur où arrivaient un beau matin tous les états de Bretagne « dans « quatre carrosses à six chevaux, avec < cinquante gardes à cheval; » cette chapelle que lui bâtissait son abbé, le bien bon, car tout est toujours bon autour des personnes aimables et bonnes. Ces jardins enfin, ce Mail, ces bois dont elle parle si souvent avec une véritable affection, où elle aimait à se promener toute seule en tête à tête, comme disait Ton

|

quedec, et où elle allait rêver un peu à Dieu, à sa providence, posséder son âme, songer à son avenir.......

Le jardin, le Mail, les bois sont comme à l'époque où elle en recherchait la douce solitude. Il y a des avenues de chênes à perte de vue, formant des voûtes de verdure où ne pénètrent pas les rayons du soleil. Le parterre est toujours bordé d'une infinité de tout petits tilleuls, alignés et taillés, et surmontés de dômes de verdure parfaitement ronds, comme au temps où Pilois élevait ces chers petits arbres avec une probité admirable. On montre même un vieil oranger qui date, assure-t-on, de cette époque, et dont, bien entendu, je cueillis avec attendrissement une feuille.

Le jardinier actuel des Rochers est lui-même un bel esprit, qui nous parut tenir un peu des Jodelet et des Mascarille d'autrefois. En nous faisant remarquer, entre autres curiosités du Mail, un écho qui n'est point entendu de la personne qui parle, mais bien de celle placée à quelque distance, il nous dit agréablement : « Cet écho, vous le voyez, ressemble à plus d'une capricieuse jeune femme il ne répond pas à celui qui lui parle, et s'en va chercher celui qui « ne lui dit rien. ›

En revenant des Rochers, nous nous entretinmes long-temps de madame de Sévigné, non pas de son esprit et de son style, ce serait aujourd'hui le plus insupportable lieu commun, mais de quelque chose qu'on a moins étudié chez elle : c'est la belle âme qui se trouvait sous cette parure si brillante, mais bien un peu légère, du siècle de Louis XIV: c'est, par exemple, le courage de son dévoûment pour son ami malheureux qu'avait foudroyé le demi-dieu de Versailles, et en même temps la pureté et la dignité de sa conduite au milieu de cette cour aux mœurs faciles, où, si jeune et si belle, elle put aller toujours la tête haute..

Elle avait en elle l'arôme qui empêche la fleur de se corrompre, et l'on s'aperçoit en lisant ses lettres des Rochers que l'influence du train de vie de Versailles et de, la frivolité du grand monde faisaient bien vite place, quand elle revenait dans ses bois, à une sensibilité tou

chante, à une philosophie calme et toute chrétienne, à une foi naïve et respectueuse, précise et régulière, bien diffé

rente des religiosités vagues et sans résultat de notre époque.. E. DE CONDÉ.

LE COMTE DE VARFEUIL,

OU LES COMBATS DE LA FOI DANS L'ADVERSITÉ, PAR M. D'EXAUVILLEZ ;

Rue des Maçons-Sorbonne, à Paris, 3.

[ocr errors]

Voici véritablement un roman intime | les plus populaires à cet égard, non pas et moral. Et je ne sais pas pourquoi je à Paris ni dans ses journaux, il est vrai l'appelle roman, car je sais que ce n'est car il n'en a pas eu besoin pour arriver point une fable, mais la fidèle histoire au succès et pour bien vendre ses oud'un homme honnête et malheureux, vrages. Son Bon Curé s'est vendu à 40,000 d'une âme tendre et incessamment dé- exemplaires, et aucune feuille publique chirée par la perte et de sa fortune et de n'en a parlé. ses plus chères affections. En effet, le héros de ce livre perd tout, hors la foi. Celle-ci, malgré les atteintes de l'esprit mauvais qui le poursuit, il la conserve opiniâtrément comme la seule et dernière ressource, comme l'ancre de miséricorde ou la planche dans le naufrage.

Ce livre a, de l'intérêt; il palpite. On voit bien que ce n'est point là de la fiction, et l'on sent présque à chaque phrase le trait poignant de la vérité.

Oui, c'est ainsi que l'on est, c'est ainsi que l'on souffre lorsqu'on a tout perdu et qu'on espère encore.

On pourrait appeler ce livre le livre, de la patience et de la résignation, et son héros le modèle de la constance et du courage. Un tel ouvrage sera utile; il consolera la douleur, et il aidera la vertu qui combat.

Et nous le recommandons d'autant plus volontiers, que, tout électrique qu'il soit, il est, comme nous l'avons dit, moral; il est même édifiant et pieux : il vous remue, il vous contriste, il vous arrache des larmes; mais il vous éloigne du vice et vous porte à la vertu ; il vous inspire du courage et vous apprend à souffrir en chrétien.

On ne s'en étonnera point, quand on se rappellera que l'auteur de cet ouvrage est M. d'Exauvillez. M. d'Exauvillez a fait ses preuves comme écrivain pieux; c'est peut-être même l'un de nos écrivains les plus goûtés, les plus connus et

Puisqu'il en a été ainsi de ce petit livre, nous prédisons de plus beaux destins aux Combats de la Foi que nous annonçons aujourd'hui ; car cet ouvrage, s'il est plus cher, est aussi plus important que celui du Bon Curé, et l'intérêt, le style en sont bien. Les Combats sont ce que M. d'Exauvillez a fait de mieux, et il a fait de bonnes choses. Ce livre sera recommandé par la vieillesse à la jeunesse, et par la jeunesse elle-même aux autres âges, comme un éloquent plaidoyer, comme une belle leçon en faveur de la religion, du courage chrétien et de l'espérance dans l'infortune. On avouera qu'un tel livre n'est pas inutile de nos jours, et qu'il vient même fort propos.

Puisse-t-il, s'écrie son religieux auteur, puisse -t-il verser quelque baume sur des blessures dont j'apprécie mieux que personne les cuisantes douleurs ! S'il en cicatrisait une seule au cœur d'un père aussi malheureux que moi, ah ! je serais bien payé de mon travail; car je lui aurais rendu plus que la vie, je lui aurais rendu le repos de l'âme, et la différence est grande, je puis le certifier !..... >

Mais quel est donc ce livre, et que contient-il? Voici :

Par suite d'événemens malheureux, le comte de Varfeuil réduit à la dernière misère, et se rendant à pied au village où son fils est malade, tombe de faiblesse en priant dans une église de Saumur, Une

- Une telle déclaration me la rend bien chère, mon enfant aussi, sois certain qu'elle n'aura point à regretter l'intérêt qu'elle t'a témoigné.

dame charitable de l'endroit, madame | Sans elle, mon père, il y a long-temps Dampierre, le fait secourir et transpor- que vous n'auriez plus de fils. ter chez elle, où elle le fait soigner par un médecin confident de toutes ses bonnes œuvres. Le nom du comte que la charitable dame a lu sur son passe-port qu'il avait laissé tomber au moment de sa défaillance, lui a appris qu'elle venait de trouver en lui un homme qu'elle cherche depuis longtemps, et avec qui elle a un compte important à régler. Aussi recommande-t-elle au médecin de se mettre entièrement aux ordres du comte souffrant, et de ne rien négliger pour le satisfaire, le guérir et le rendre à la vie.

Voyant son malade revenir à lui-même, et sachant qu'il voyage pour aller voir son fils malade lui-même, il lui propose de se rendre auprès de lui, afin qu'il puisse lui donner ses soins paternels. Le comte n'ayant de quoi payer ni son médecin, ni sa route, refuse d'abord. Pressé par le médecin, il hésite; on s'explique, et à la suite des explications, ils partent tous deux en chaise de poste.

Arrivé au but de son voyage, le comte trouve son fils entrant en convalescence, et apprend les soins que lui a rendus une jeune fille qui travaillait dans l'auberge.

On juge bien quelle doit être l'entrevue du père et du fils: ce sont de violens embrassemens, et les prescriptions du médecin ne peuvent rien contre leur joie de se retrouver vivans.

Mais cette joie trop vive est fatale au jeune homme. Amédée retombe sur son lit plus faible et plus agonisant que jamais. Son père non moins souffrant pleure maintenant à ses côtés. Que de regrets pour un peu de joie, dit-il douloureusement! Mon Dieu ! telle sera donc toujours ma triste destinée !

On transporte le jeune malade chez le curé ; mais la convalescence ne revient pas: il a presque tout perdu de la vie, hors la mémoire. Dans son sommeil il parle de Rose, et dans le jour il dit à son père tous les services qu'elle lui a rendus. Je les connais, lui dit son père, et j'en suis reconnaissant.

-Oh mon père ! il est impossible qu'on vous ait dit tout ce que je lui dois; c'est à peine si moi-même je le sais encore.

- Jamais nous ne pourrons, mon père, les reconnaître autant qu'elle le mérite. Savez-vous que sous plus d'un rapport elle a été mon bon ange? On vous a dit une partie des soins qu'elle m'a donnés; mais en même temps qu'elle veillait assidûment à soulager mes souffrances corporelles, elle n'oubliait pas mes besoins spirituels; c'est elle qui a fait venir monsieur le curé, et m'a fait recevoir les derniers sacremens. Et lorsque la maladie me laissait un peu de repos, au lieu d'en profiter pour elle-même, assise au chevet de mon lit, elle m'édifiait par quelque lecture pieuse et intéressante, qui faisait une utile diversion à mes douleurs, et qui souvent m'inspirait le courage et la résignation dont j'avais besoin pour les supporter. ›

Le malade s'anime en parlant ainsi et en voyant son père. Le docteur s'en aperçoit, et invite le comte à sortir de la chambre de son fils. Le pauvre père obéit ; il va se promener seul déjà dans le jardin du curé. Là il pense à sa vie, récapitule ses malheurs, et se demande, presque au désespoir, s'ils ne finiront donc pas bientôt! Non, sans doute, et je perdrai mon fils, car je crains trop de le perdre. Le pire, c'est constamment ce qui m'est arrivé; désormais je m'attends à tout, et sans fortune, je me vois également sans fils, sans consolation, sans appui de vieillesse.

Mais au milieu de cette désolation du comte, ces mots du docteur viennent frapper ses oreilles Consolez-vous, Monsieur, vous êtes plus près que vous ne pensez de changer de position et d'avoir de quoi témoigner votre reconnaissance à ceux qui vous auront servi. Mais le docteur n'en dit pas davantage; il laisse le comte dans le trouble et la confusion de mille pensées qui l'agitent, et repart pour Saumur, où le rappellent les affaires de son art. Un autre médecin, un médecin plus doux, la dévouée Rose est à son tour rappelée près du malade, et à son arrivée les symptômes fâcheux dis

paraissent, et la convalescence d'Amédée | portait les derniers sacremens. Tout ce

marche à grands pas.

A cette vue, le comte ne se possède plus; il s'exalte dans sa joie, et l'auteur se complaît ici à décrire le bonheur que nous donne la convalescence d'un malade chéri. Quand toutes les craintes ont enfin cessé, nous dit-il, quand la mort menaçante a paru enfin abandonner sa proie, comme nous saluons avec ravissement les progrès d'une convalescence toujours lente pour nos vœux impatiens! comme nous les remarquons avec enthousiasme! avec quel transport délirant nous les signalons à tout ce qui nous entoure! Oh! c'est alors que chacune de ses paroles est pour nous un bien inestimable, c'est alors que dans les effusions d'une tendresse réciproque nous donnons et nous recevons tout à la fois le bonheur le plus grand qu'il soit pérmis à l'homme d'éprouver ici-bas; nous en jouissons sans crainte, pleinement, entièrement; notre âme surabonde de joie, elle nage au milieu d'un océan des plus pures félicités. Richesses, plaisirs, honneurs, gloire du monde, non, vos plus grandes douceurs n'ont rien qui approche de ces ineffables voluptés. Tels étaient les transports du père à la vue de son fils renaissant. ›

Le docteur revient, et le curé insiste pour que Rose soit éloignée; ensuite il apprend au comte que ces deux jeunes gens s'aiment. Le comte, reconnaissant des services de Rose, consent à leur union. Pour lui éviter des regrets relativement à ce parti pour son fils, le docteur apprend enfin positivement au comte qu'une partie de son ancienne fortune lui est rendue. Le comte ne change point d'intention pour cela, et il persiste dans son consentement à l'union de son fils et de Rose,

Rose, éloignée momentanément du lit d'Amédée, et ignorant ce qui se prépare en sa faveur, souffre beaucoup, et se sent même prise d'un accès de fièvre. D'autre part, son absence cause de vives inquiétudes au jeune malade, qui la croit malade aussi et qui pense qu'on lui cache son danger. Les inquiétudes d'Amédée compliquent sa maladie. La cloche du village sonnait alors une agonie : Amédée s'imagine que c'est celle de Rose et qu'on lui

qu'on put faire pour le détromper fut inutile.

Le jeune homme sentant son état demande lui-même au prêtre les derniers sacremens. «Que la religion est belle! s'écrie l'auteur à ce sujet, alors que déployant toutes les richesses de son divin auteur elle vient s'asseoir au lit du malade, et là sur les confins de la vie et de la mort, à ce moment suprême, qui va terminer tout ce qui passe, et commencer tout ce qui ne passera jamais, elle lui montre son Dieu lui-même qui vient le chercher pour l'introduire dans le séjour ineffable de sa gloire céleste. O mort! où est ton aiguillon? La croix t'a vaincue; armé de ce signe puissant, le chrétien se rit de tes menaces, il salue ton approche, il'bénit tes rigueurs. Là terre fuit, le monde s'écroule, le vide se fait autour de nous, tout nous quitte, tout nous abandonne; mais voici le ciel qui se découvre, le ciel avec toutes ses pompes, avec toutes ses jouissances sans fin comme sans bornes, qui s'avance pour le remplacer, Heureux échange! puisse ta bienfaisante pensée consoler mes derniers momens comme elle consola ceux du pieux Amédée. ›

Le malade soulagé par ces pieuses cérémonies, et le comte ranimé par la promesse du docteur relativement à sa fortune, il s'en suit entre eux un entretien des plus touchans. Ce sont mille plans et projets d'avenir. Mais le mieux ne fut pas long, et le malade retomba. Il mourut enfin. Rien ne reste plus au comte en ce monde, et le voilà seul, en effet, comme il l'avait prévu. Rose seule lui reste, il adoptera Rose; n'ayant pu en faire sa bru, il en fera sa fille, et essaiera de vivre encore une seconde fois d'illusion. Cependant il sait son avenir désormais, et il le dit à l'enfant qu'il adopte, et qui le comble de caresses et de soins. Elle espère, elle croit adoucir par là les chagrins de son père et le rendre au bonheur; mais le comte la détrompe.

‹ Vois-tu, mon enfant, lui dit-il, je veux t'en prévenir d'avance, toutes tes attentions et tous tes soins ne pourront jamais rien contre cette douleur. Mes larmes cesseront de couler, je le crois; mais mon cœur restera toujours brisé;

« ZurückWeiter »