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rige tous les jours. Il faut bien le reconnaître après les brillans mais infructueux essais qui ont eu lieu dernièrement, la véritable harmonie du vers français est celle des grands génies du siècle de Louis XIV. Le vers, mesuré autrement, est, selon nous, fort inférieur à la prose. André Chénier est un modèle admirable

du langage qui convient à cette époque. Nous devons dire que l'auteur de la Thébaïde est rarement tombé dans ces erreurs; mais nous espérons qu'il effacera ces taches qui nuisent encore au bel ensemble de son œuvre.

AMÉDÉE DUQUesnel.

SAINT AIGNAN, ÉVÊQUE D'ORLÉANS EN 391.

savoir intéresser : je vais essayer d'y réussir.

L'invasion de l'Europe presque entière par Attila fut, comme toutes les crises nationales qui torturent des générations entières, l'occasion d'un déploiement de forces surhumaines, d'où naquirent selon l'occurrence de grands crimes ou de grandes vertus.

Il est deux noms qu'on ne saurait pro- | jamais, pour mériter d'être lu, il faut noncer devant un Orléanais sans éveiller dans son âme un sentiment mêlé d'orgueil et de reconnaissance; de ces deux noms, l'un a passé dans toutes les bouches; il a éveillé toutes les sympathies, non seulement en France, mais dans l'Europe entière, et nul être capable de s'enflammer d'amour pour son pays, d'admirer ce qui est beau, ce qui est grand, ce qui est sublime, ne prononce Parmi les célébrités qui surgirent du sans respect le nom de la jeune fille qui sein de l'Église à cette époque mémorasauva un royaume, et qui, pour prix des ble, saint Aignan se présente un des preplus merveilleux exploits, périt à dix- miers à côté de sainte Geneviève de Pahuit ans du plus horrible supplice: de ris, de saint Sévère de Trèves, de saint Jeanne d'Arc, enfin, dont le front virgi-Germain d'Auxerre et de saint Loup de nal resplendit des rayons de deux gloires également belles; de cette Jeanne, qui fut guerrière sans peur et femme sans reproche.

L'autre nom, quoique moins connu, mérite néanmoins de l'être, car il s'offre aux regards de l'histoire sous la sauvegarde des vertus chrétiennes. Ses droits à la vénération des hommes sont incontestables; car à qui décerneront-ils les palmes de l'immortalité, si ce n'est à ceux dont le génie ne se signale que par des bienfaits!

Troyes.

Une Vie de saint Aignan, écrite quatre-vingt-six ans après sa mort, au temps de Grégoire de Tours, s'est perdue peutêtre lors de l'invasion des Normands; il en reste trois autres manuscrites; la plus ancienne remonte au neuvième siècle environ. Plusieurs historiens latins ont aussi parlé de saint Aignan, tels que Sidonius Apollinaris, etc., et après eux, Helgault, de La Saussaye, Bouquet, Duchesne, Hubert, etc.; mais la réunion de tous les documens où l'on peut recourir ne présente pas un ensemble complet: il nous faut donc recomposer l'unité à l'aide de débris; nous travaillerons à cette œuvre dans cette vue toujours attrayante, celle de rendre hommage à la vertu et à la vérité.

Ecrire la vie de saint Aignan, c'est tout ensemble réparer une injustice du sort et combler une lacune dans nos annales historiques; mais remuer la poudre impalpable d'un passé accompli depuis quatorze siècles pour reconstruire avec ses parcelles éparses un corps saisissa- Saint Aignan ou Agnan naquit à Vienne, ble, vivant, coloré, et accepter cette dans le Dauphiné, en 378. Les chronitâche au dix-neuvième siècle, c'est s'en-ques sont muettes sur les premières angager à faire tout à la fois du dramé et de l'histoire; car aujourd'hui plus que

TOME VIII. - N° 46. 1839.

nées de son existence, et nous ne ressaisissons ses traces qu'au moment où, par

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venu à la jeunesse, elles nous le repré, sentent doué des avantages les plus flatteurs, s'arrachant aux séductions du monde pour se livrer à une seule passion, celle de la vie contemplative, et se reti, rant dans un château solitaire situé près d'Orléans, sur les bords agrestes de la Loire.

Les motifs qui déterminèrent le jeune Aignan à préférer l'isolement au contact de ses semblables, dans un âge où l'on vit ordinairement plus en autrui qu'en soi-même, sont du nombre de ceux qu'on peut pressentir plus qu'assigner; car, dans l'histoire du cœur humain, la pudeur où l'intérêt déchirent bien des pages, mais la curiosité se plaît à recueillir leurs fragmens. Certes, nous sommes loin des temps où la passion s'augmentait par le sacrifice; mais n'oublions pas que nous sommes auguatrième siècle; que ce sentiment it alors sa religion, sa ferveur, son få tisme même, et cela devait être ainsi. L'enfance des peuples ressemble à l'enfance des hommes: chez les uns comme chez les autres, l'exagération est un principe vital; le bien et le mal sont sans cesse en présence et se livrent bataille visière haute; point de transitions, point de demi-teintes, mais seulement des ombres vigoureuses et de vives lumières. Le moyen âge est une ébauche de civilisation dont l'originalité frappe et captive : ne pourrait-il pas être comparé à une esquisse dans laquelle un grand peintre verse avec négligence et profusion la somme entière de ses idées, le superflu de sa palette, dépassant ainsi les limites dų bien, mais imprimant à son œuvre le mouvement et la vie? Revenons à saint Aignan.

Si la solitude conduit presque toujours à l'égoïsme, elle nourrit aussi les grandes pensées; l'esprit s'étend quelquefois en raison du raccourcissement des rayons du cœur; on sent moins, mais on pense plus.

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et l'imagination, se chargeant d'expli quer l'inconnu, donnait à tout des proportions gigantesques. Ceci est une des causes qui ont accru le nombre prodigieux de célébrités religieuses, auxquelles la physionomie du moyen âge doit un trait de plus.

J'ai dit que le jeune Aignan avait choisi pour retraite un château situé près d'Orléans, et je le répète, párce que ce fait, fort simple en soi, va recevoir, des motifs qui l'ont amené, un véritable intérêt.

Chaque homme possède un certain tact, une sorte d'odorat qui lui fait découvrir au premier moment les similitudes et les différences qui existent entre lui et le prochain, De cette vision naissent la sympathie et l'antipathie; ce fut la sympathie qui détermina Aignan dans le choix de son ermitage, et c'est à ce choix qu'il dut le rang éminent que Dieu lui destinait dans l'Église. Telles on voit deux gouttes d'eau fort proches fondre tout-à-coup l'une sur l'autre, et de deux qu'elles étaient ne présenter que l'unité, telles deux âmes qui se conviennent s'attirent et se confondent. Aignan et Euverte en firent l'expérience, Ce phénomène n'est pas rare; mais ce qui, dans cette circonstance, ajoute à l'intérêt, c'est qu'il s'opéra, en dépit des distances naturelles et sociales. En effet, Aignan était dans la fleur de la jeunesse, et Euverte touchait presque au terme de sa carrière. L'un vivait obscur et solitaire; l'autre occupait un trône pontifical; il était évêque d'Orléans. Tout devait faire présumer que ces deux hommes, l'un au pied de la montagne, l'autre au sommet, ne se rencontreraient pas; le contraire arriva. Le jeune Aignan avait aperçu celui qui devait être bientôt son ami, dans une de ces circonstances qui semblent naître tout exprès pour forcer l'âme à des irruptions soudaines qui la trahissent et tous deux ils s'aimaient déjà qu'ils ne le savaient pas encore; aussi, quand Aignan choisit son ermitage non loin des lieux habités par Euverte, il ne se dit pas Je serai près de lui; je ‹ pourrai le voir quand sa charité le fera

Bien qu'à cette époque les réclusions volontaires ne fussent pas rares, elles excitaient cependant toujours l'intérêt lorsqu'à la singularité du fait venaient se joindre des particularités attachantes,‹errer dans la campagne, quand les socomme la jeunesse, la beauté, le mystère; alors la curiosité n'avait pas de bornes

lennités de l'Eglise m'appelleront dans le temple de Dieu. Il ne s'était pas dit

Un succès mérité ne rencontre que des inimitiés passagères; il y a dans les masses une justice qui crie plus haut que l'envie et la malignité. Si la jeunesse d'Aignan excita quelques jalousies particulières; au regard de tous elle ne fit qu'ajouter un charme de plus à son mé. rite et à ses vertus.

Cependant une vive douleur devait bientôt atteindre le cœur du jeune prélat; son digne ami touchait au terme de sa carrière, et le 7 septembre 391 il reçut à la fois sa dernière bénédiction et son dernier soupir.

tout cela; mais il avait obéi à l'une de | front où la jeunesse de l'âme ne brillait ces voix secrètes qui nous commandent pas moins que celle de l'âge. à notre insu, et disposent de nous quand nous croyons être libres. Euverte, de son côté, se disait : « Le regard d'Aignan est ‹ mélancolique; ses yeux si beaux sont tristes; Aignan a besoin d'un père, ‹ d'un ami; je serai pour lui l'un et < l'autre ; qu'il vienne, je veux le revoir, < lui parler, descendre dans son âme. › Aignan, sur l'invitation qui lui fut faite, se rendit à la demeure épiscopale. Ce ne fut pas sans émotion, sans doute, qu'il vit s'élever et retomber sur lui la lourde tenture qui dissimulait l'entrée du réduit modeste où l'attendait le digne prélat. Il serait fort curieux d'être initié aux détails d'un entretien dont nous ne connaissons que les résultats; car la présence d'un tiers l'eût rendu impossible: d'un côté, l'âge dépouillant son austérité pour revêtir les grâces qui naissent de l'abandon; de l'autre, la jeunesse soulevant les voiles du mystère pour puiser à la source de l'expérience des forces et des consolations nouvelles. Mais abrégeons; peu de temps après cette conférence, Aignan fut ordonné prêtre et appelé à la conduite du monastère de Saint-puissans, fit appeler le nouvel évêque et Laurent-des-Orgerils, situé dans un des faubourgs d'Orléans. C'était une espèce de noviciat que lui faisait subir Euverte, qui avait ses vues pour en agir ainsi. Sentant ses forces diminuer, le sage pré-ver sa reconnaissance. Celui-ci, fidèle à lat voulait se décharger d'un fardeau si pesant, et il caressait la pensée d'investir son fils adoptif d'une dignité qui devait mettre en évidence les hautes qualités qu'il avait devinées en lui.

Les êtres supérieurs impriment un mouvement ascendant à tout ce qu'ils touchent, attirant à eux, par une sorte de puissance magnétique, ce qui vit dans le cercle soumis à leur influence.

Aignan eut à peine commencé sa mission que tout changea dans le monde isolé qu'il avait à gouverner; l'esprit de désordre et de mesquinerie fit place aux sentimens d'urbanité, aux idées généreuses; on n'était frère que de nom; on le devint par la charité. L'expérience était faite, l'épreuve suffisante. Euverte le sentit, et bientôt la mitre dorée, qui chancelait sur une tête septuagénaire, vint relever l'éclat et la noblesse d'un

Soixante ans vont s'écouler, durant lesquels saint Aignan se révèle à la postérité par le zèle et le talent qu'il déploya en 407 contre Arius, fameux hérétique dont les doctrines ne purent prévaloir dans le diocèse confié au saint pontife; puis par deux legs d'un mérite différent un bienfait et une cathédrale. Quant au bienfait, voici ce qu'on rapporte: Agrippin, préfet romain, près de succomber à une maladie pour laquelle tous les secours de l'art avaient été im

le pria d'intercéder le ciel en sa faveur ; peu de temps après, ayant recouvré la santé, il exigea qu'Aignan lui indiquât les moyens les plus propres à lui prou

son noble caractère, ne demanda d'autre faveur que celle de pouvoir exercer en grand cette ardente charité dont il venait de prodiguer les témoignages: il demanda la délivrance de tous les prisonniers renfermés alors dans les murs d'Orléans.

travers

Quelques jours après, les populations des cités et des bourgades environnantes, s'étant jointes à celle de la ville, se pressaient sur les pas d'un seul homme : cet homme, c'était le jeune Aignan, qui s'avançait, bénissant et béni, les flots d'un peuple admirateur. A sa voix les cachots s'ouvrent, les fers tombent; les captifs se précipitent; ils revoient la lumière, le ciel, la nature; puis ils tombent à genoux devant leur bienfaiteur, qui, par ses libéralités, achève l'œuvre de rédemption qu'il a commencée. Depuis, un privilége particulier

perpétua le souvenir de cette sainte gloire, en conférant aux successeurs de saint Aignan le droit de grâce au jour de leur entrée pontificale. Dans la suite, cette entrée devint encore plus solennelle, mais moins touchante. Quatre barons du duché d'Orléans étaient obligés d'y porter sur leurs épaules l'évêque assis dans un fauteuil. La première de ces prérogatives fut conservée jusqu'au régne de Louis XV; mais à cette époque (en 1758), elle fut restreinte au droit d'intercession près du monarque. Les traces de cet antique usage ne disparurent entièrement qu'au temps où tous les priviléges furent abolis (1).

(1) Notice sur l'ancienne réception des évêques

d'Orléans.

Les procès-verbaux du cérémonial qui s'observait lors de l'entrée des évêques à Orléans, contiennent des particularités qui ne sont pas sans intérêt. On nous saura peut-être gré d'en rapporter quelques unes.

Quarante jours avant celui de l'entrée du nouveau prélat, on la faisait publier au son des trompettes et des tambours; puis l'évêque envoyait son procureur fiscal et un notaire pour requérir les quatre barons ou seigneurs qui étaient tenus de le porter depuis la porte du cloître de Saint-Aignan jusqu'à | la porte principale de la cathédrale, de s'y trouver en personne ou de s'y faire représenter dignement. Ces quatre seigneurs étaient le baron d'Yèvre-leChastel, le baron de Sully, le baron du Chérai-lesMeung, le baron d'Aschires et Rougemont. Les chroniques rapportent diversement l'origine de cet usage. Trois jours avant son entrée, l'évêque se faisait apporter la liste des prisonniers; un bureau était formé pour juger si les cas étaient rémissibles, et des prédications leur étaient faites matin et soir jusqu'au jour de leur délivrance.

La surveille de la cérémonie, l'évêque se rendait à l'abbaye de Notre-Dame-de-la-Cour-Dieu, située à six lieues de la ville, dans la forêt d'Orléans. A quelques pas du monastère, on lui présentait les livres où étaient contenus les formules des sermens relatifs à la conservation des priviléges de l'abbaye, et l'évêque faisait serment de les respecter, « sauf mon droit, ajoutait-il.

Les cérémonies religieuses accomplies, il était introduit à l'hôtel abbatial, où il avait droit de pròcuration, c'est-à-dire qu'il était logé et traité lui et sa suite pour cette fois seulement.

De la Cour-Dieu, il se rendait à Orléans, s'arrêtant à l'abbaye de Saint-Loup, monastère de filles de l'ordre de Saint-Bernard, puis il allait à l'abbaye Saint-Euverte, où les formalités précédentes s'observaient rigoureusement, sauf le serment. Le droit de procuration l'autorisait à souper et coucher dans

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Puisque j'ai prononcé le mot cathédrale, je ne saurais résister à l'occasion qui s'offre de consacrer une page à l'un des plus beaux monumens dont la France doit s'enorgueillir, et dont cependant on a très peu parlé. Cette digression, du reste, n'est point hors de propos, puisque la pensée de ce monument et une partie des fondations sont dues au zèle éclairé du prélat dont nous écrivons l'histoire.

Figurez-vous deux tours de formes identiques et de hauteurs semblables, élevant leurs têtes rivales à 368 pieds du sol, portant leurs trois étages de dimensions différentes jusque dans la région

le monastère; toutefois, les abbés prétendaient n'être tenus d'offrir à l'évêque que deux œufs frais, un lit pour lui et une botte de foin pour sa mule. Ces choses étaient en effet présentées par les officiers de justice du couvent. Il était fait procès-verbal de présentation, contre lequel le syndic du chapitre faisait le sien, prétendant qu'outre les deux œufs frais, l'abbé était obligé de donner un souper convenable au seigneur évèque et à tous ceux qui l'accompagnaient.

C'est à Saint-Euverte, qu'au jour fixé, le clergé de la ville et des environs, les communautés religieuses, les pauvres de l'hôpital venaient chercher l'évêque, qui se rendait à Saint-Aignan n'ayant pour toute chaussure que des sandales.

Au cortége religieux se joignaient les autorités civiles et militaires de la ville; arrivés à l'église, les marguilliers lavaient les pieds de l'évêque et les lui parfumaient, ce pourquoi ils recevaient sur-lechamp en échange de cet office quarante sous parisis, puis ils le chaussaient de bas, de brodequins et de sandales de damas rouge, enfin ils le vêtissaient d'une tunique et d'une dalmatique de même couleur, par-dessus laquelle on passait une chape de brocart d'or. Les mains n'étaient point oubliées : elles étaient recouvertes de gants de soie rouge brodés d'or. On échangeait ensuite sa mître contre une plus riche, et la crosse, jusqu'alors voilée de taffetas blanc, était découverte. L'évêque, en sortant de l'église, était porté de la nef hors du cloître; là, faisant tourner son fauteuil de manière à être en face des chanoines, il leur donnait pour adieu sa bénédiction. On abaissait alors sa chaise, et il se levait pour se rasseoir dans un autre fauteuil tourné en sens contraire. C'était à ce moment que commençaient les fonctions des barons. Arrivé à la porte Bourgogne, les juges lui présentaient les criminels en faisant serment de n'avoir ni détenu, ni détourné aucuns prisonniers de leur ressort, comme aussi de n'avoir avancé leur jugement ou leur exécution de manière à les priver de leur grâce, enfin de n'avoir rien fait qui pût nuire au privilége de

des nuages qui viennent se jouer et se heurter entre leurs mille colonnettes et leurs légères dentelures; voilà ce qui saisira votre regard, si, placé sur le beau pont qui partage la Loire, votre visage est tourné vers le nord-est.

Avez-vous assez considéré ces géantes aux fronts couronnés de joyaux qui se détachent sur l'azur des cieux, tantôt sombres et grisâtres, tantôt lumineuses et dorées ? Approchez du pied de l'édi- | fice. Voyez ce portail; quelle élégance! Comme les lignes principales en sont belles et faciles à saisir, car les ornemens y sont prodigués sans abus! Examinez le flanc de l'édifice, paré de pointes pyramidales qui terminent avec tant d'élégance et de variété les piliers protecteurs du vaisseau gothique; puis, si vous n'êtes pas encore fatigué d'admiration, vous jouirez à la vue de ce petit clocheton octogone si délié, qui s'élève audessus de la nef, et semble un joli page à la suite de deux belles et brillantes souveraines. Tout est bien, tout plaît dans cette œuvre qu'on ne saurait se lasser de contempler, parce qu'on découvre sans cesse de nouvelles perfections, soit dans les détails, soit dans l'ensemble.

Le projet de percer une rue de soixante pieds de largeur, traversant Orléans depuis le portail de Sainte-Croix jusqu'à la rue Royale, doublera, en s'accomplissant, la valeur d'un monument que beaucoup de voyageurs sont privés d'admirer,

l'évêque. Ceci fait, les criminels se prosternaient en criant par trois fois miséricorde; puis s'étant relevés, ils se joignaient au cortége, marchaient deux à deux, la tête nue, et précédés de leurs geôliers.

et qui souffre du voisinage de vieilles échoppes et de divers bâtimens qui, nous l'espérons, seront un jour démolis. L'hopital, entre autres, adossé à l'un de ses flancs, est un de ceux qui nuisent le plus à l'effet pittoresque de l'édifice.

Les premiers fondateurs de SainteCroix furent saint Euverte et saint Aignan; mais ce monument est bien loin d'offrir l'aspect qui le distinguait à son origine. La nef, construite dans le principe sur deux lignes parallèles, a maintenant deux saillies sur les flancs, qui ont été ajoutées sous Louis XIV; le clocher n'a été posé qu'en 1790, et les tours aussi n'ont été achevées qu'à cette époque; elles sont l'œuvre de trois célèbres architectes: Gabriel, Trouard et Pâris (1). Les tours, du siècle de saint Aignan, démolies en 1725, n'étaient pas de largeur semblable; des toits pointus, terminés par des croix en fer, les couronnaient; un portail, large seulement de 24 pieds, les unissait.

Les catastrophes qui ont nécessité les reconstructions successives et fréquentes de ce temple gothique, offrent un intérêt historique que nous nous proposons d'exploiter quelque jour; on sera sans doute curieux d'apprendre comment un édifice commencé dans le quatrième siècle n'est pas encore entièrement terminé dans le dix-neuvième; comment chaque flot de génération lui a laissé une pierre à son passage; comment enfin un monument dont l'ensemble est plein d'harmonie, recèle cependant la tradition de tous les âges, depuis le premier jusqu'au dernier roi de France.

Mais voilà une digression pour laquelle

Enfin, on arrivait à la cathédrale, et après un office je dois demander grâce. Ceux qui auront

solennel, on se rendait à l'hôtel épiscopal où différentes tables étaient dressées pour traiter selon leur rang les personnes qui avaient fait partie du cortége. Le dîner était suivi d'une exhortation adressée

aux rémissionnaires rassemblés dans la cour de l'hôtel et placés sur des estrades préparées à cet effet. Après cette prédication, ils se prosternaient de nouveau, criaient encore trois fois miséricorde, et l'évêque, d'une des fenêtres de son palais, les déclarait absous; après quoi on leur distribuait les restes des tables, et tout était terminé.

Le nombre des prisonniers délivrés par les évêques était souvent très considérable; il s'éleva❘ dans les derniers temps jusqu'à huit cent soixantecinq.

vu Sainte-Croix d'Orléans me le pardonneront, j'espère; car ils n'auront pas oublié, sans doute, cette œuvre de génie et de goût qui s'élève majestueuse, élégante et fantastique au sein de la vieille cité.

(1) Les descendans de M. Gabriel, à qui nous devons le portail de Sainte-Croix et le premier étage de ses tours, habitent Orléans. M. le baron de Morogues, pair de France, possesseur de cette belle propriété qui, sous le nom de la Source, attire les voyageurs, s'honore de compter le célèbre architecte parmi ses ancêtres.

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