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on se trouve hors d'état de leur donner le degré de certitude des faits; sur ce que deux faits étant donnés comme réels à lier par une suite de faits intermédiaires, inconnus ou regardés comme tels, c'est à l'histoire, quand on l'a, de donner les faits qui les lient; c'est à la philosophie, à son défaut, de déterminer les faits semblables qui peuvent les lier; enfin sur ce qu'en matière d'événemens, la similitude réduit les faits à un beau-. coup plus petit nombre de classes différentes qu'on ne se l'imagine. Il me suffit d'offrir ces objets à la considération de mes juges; il me suffit d'avoir fait en sorte que les lecteurs vulgaires n'eussent pas besoin de les considérer.

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SECONDE PARTIE.

Le premier qui ayant enclos un terrain,

s'avisa de dire, ceci est à moi, et trouva des gens assez simples pour le croire, fut le vrai fondateur de la société civile. Que de crimes, de guerres, de meurtres, que de misères et d'horreurs n'eût point épargné au genre-bumain celui qui, arrachant les pieux ou com→ blant le fossé, eût crié à ses semblables: Gardez-vous d'écouter cet imposteur; vous êtes perdus si vous oubliez que les fruits sont à tous, et que la terre n'est à personne ! Mais il y a grande apparence qu'alors les choses en étoient déja venues au point de ne pouvoir plus durer comme elles étoient; car cette idée de propriété, dépendant de beaucoup d'idées antérieures qui n'ont pu naître que successivement, ne se forma pas tout d'un coup dans l'esprit humain: il fallut faire bien des progrès, acquérir bien de l'industrie et des lumières, les transmettre et les augmerter d'âge en âge avant que d'arriver à ce dernier terme de l'état de nature. Reprenons donc les choses de plus haut, et tâchons de

rassembler, sous un seul point de vue, cette lente succession d'évén mens et de connoissances dans leur ordre le plus naturel.

Le premier sentiment de l'homme fut celui de son existence; son premier soin, celui de sa conservation. Les productions de la terre lui fournissoient tous les secours nécessaires, l'instinct le porta à en faire usage. La faim, d'autres appétits lui faisant éprouver tour-àtour diverses manières d'exister, il y en eut une qui l'invita à perpétuer son espèce; et ce penchant aveugle, dépourvu de tout sentiment du cœur, ne produisoit qu'un acte purement animal. Le besoin satisfait, les deux sexes ne se reconnoissoient plus et l'enfant même n'étott plus rien à la mère, sitôt qu'il pouvoit se passer d'elle.

Telle fut la condition de l'homme naissant; telle fut la vie d'un animal, borné d'abord aux pures sensations, et profitant à peine des dons que lui offroit la nature, loin de songer à lui rien arracher: mais il se présenta bientôt des difficultés; il fallut apprendre àles vaincre : la hauteur des arbres qui l'empêchoit d'atteindre à leurs fruits, la concurrence des animaux qui cherchoient à s'en nourrir, la férocité de ceux qui en vouloient à sa propre vie, tout l'obligea de s'appliquer aux exer

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eices du corps; il fallut se rendre agile, vite à la course, vigoureux au combat. Les armes naturelles qui sont les branches d'arbres et les pierres, se trouvèrent bientôt sous sa main. Il apprit à surmonter les obstacles de la nature, à combattre au besoin les autres animaux, à disputer sa subsistance aux hommes mêmes, ou à se dédommager de ce qu'il falloit céder au plus fort.

A mesure que le genre-humain s'étendit, les peines se multiplièrent avec les hommes. La différence des terrains, des climats, des saisons, put les forcer à en mettre dans leurs manières de vivre. Des années stériles, des hivers longs et rudes, des étés brûlans qui consument tout, exigèrent d'eux une nouvelle industrie. Le long de la mer et des rivières, ils inventèrent la ligne et le hameçon, et devinrent pêcheurs et ichtyographes. Dans les forêts, ils se firent des arcs et des flèches, et devinrent chasseurs et gueriers. Dans les pays froids, ils se couvrirent des peaux des bêtes qu'ils avoient tuées. Le tonnerre, un volcan, ou quelque heureux hasard leur fit connoitre le feu, nouvelle ressource contre la rigueur de l'hiver; ils apprirent à conserver set élément, puis à le reproduire, et enfin à en

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préparer des viandes qu'auparavant ils dévo roient crues.

Cette application réitérée des êtres divers à lui-même, et des uns aux autres, 'doit na turellement engendrer dans l'esprit de l'homme les perceptions de certains rapports. Ces relations que nous exprimons par les mots de grand, de petit, de fort, de foible, de vite, de lent, de peureux, de hardi, et d'autres idées pareilles comparées au besoin et presque sans y songer, produisirent enfin chez lui quelque sorte de réflexion, ou plutôt une prudence machinale qui lui indiquoit les précautions les plus nécessaires à sa sûreté.

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Les nouvelles lumières qui résultèrent de ce développement, augmentèrent sa supériorité sur les autres animaux, en la lui faisant connoître. Il s'exerça à leur dresser des pièges, il leur donna le change en mille manières; et quoique plusieurs le surpassassent en force au combat ou en vitesse à la course de ceux qui pouvoient lui servir cu lui nuire, il devint avec le temps le maître des uns et le fléau des autres. C'est ainsi que le premier regard qu'il porta sur lui-même, y produisit le premier mouvement d'orgueil; c'est ainsi que sachant encore à peine distinguer les rangs, et se contemplant au premier par son

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