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mémoire et en revoir et achever, de manière à ne rien laisser à désirer, la composition et la rédaction. Les grands résultats, les faits principaux, ne ressortent pas assez; l'abondance même des détails les surcharge et écrase quelque peu. Le plan, l'ordre des chapitres, voudraient aussi certaines modifications: à la seconde partie a été renvoyée telle question dont la solution eût été nécessaire ou du moins fort utile à des points traités dans la première.

Malgré ces imperfections, l'Académie eût peut-être décerné le prix à ce travail estimable, si, dans le mémoire inscrit sous le numéro 1 et portant cette épigraphe, tirée de Cicéron : Quo minus ingenio possum, subsidio mihi diligentiam comparavi, elle n'avait trouvé, avec des recherches non moins étendues, non moins consciencieuses, un talent et un art supérieurs d'exposition et des vues plus larges sur l'ensemble du sujet.

Le plan de ce mémoire numéro 4 est fort bien conçu. Les divisions et subdivisions sont nettes et précises. Il eût été à désirer que cette savante et judicieuse étude se terminât par un résumé général qui eût encore mieux dégagé et coordonné les faits principaux. L'auteur est fort au courant des travaux publiés en France, en Allemagne, en Italie, sur la question qui l'occupe et sur l'économie politique en général. Nous exprimerons seulement le regret qu'il n'ait pu consulter directement, comme son concurrent, les textes hiéroglyphiques. Pour l'Egypte pharaonique, il a surtout puisé à l'ouvrage de Rosellini, qui n'est point toujours une source très-pure et très-sûre. Il n'a connu que par des analyses certains écrits sur les textes égyptiens, et il en ignore d'autres, dont il aurait pu profiter. Mais il a su, avec une rare sagacité, tirer des documents ptolémaïques récemment publiés en Italie, en Angleterre, en Hollande, en France, tout ce qui pouvait servir à la solution de la question proposée. Il rapproche ces documents nouveaux des textes classiques, les éclaire les uns par les autres, met aussi à contribution la Bible et Josèphe, tire un utile et très-légitime parti du livre d'Aristéas sur la traduction des Septante, et, portant souvent ses regards sur la Grèce, augmente, par la comparaison, la clarté et l'intérêt. Au moyen de quelques retouches, en comblant quelques lacunes, en abrégeant quelques citations, il sera facile de faire de ce mémoire un fort bon livre. Tel qu'il a été présenté à l'Académie, il est plus qu'une brillante promesse; il est un de ces pas dans la carrière qui font concevoir de sûres espérances. Conformément à l'avis unanime de sa commission, l'Académie décerne le prix, de la valeur de deux mille francs, au mémoire numéro 1, dont l'auteur est M. Giacomo Lumbroso.

L'auteur du mémoire numéro 2 est M. Félix Robiou, docteur ès lettres. Pour lui témoigner combien, à divers égards, elle juge son travail estimable, elle lui accorde une mention très-honorable, à laquelle il a été attribué par M. le ministre de l'instruction publique une médaille d'encouragement de la valeur de mille francs.

Des deux prix fondés par le baron Gobert pour le travail le plus savant et le plus profond sur l'histoire de France et les études qui s'y rattachent, l'Académie a décerné le premier à M. Roget, baron de Belloguet, pour son ouvrage intitulé Ethnogénie gauloise, ou Mémoire critique sur l'origine et la parenté des Cimmerins, des Cimbres, des Ombres, des Belges, des Ligures et des anciens Celtes, 1858-1868, 3 volumes in-8°.

Elle a décerné le second à M. de Chantelauze pour l'ouvrage dont

le titre suit: Histoire des ducs de Bourbon et des comtes de Forez, etc., par Jean-Marie de la Mure, publiée pour la première fois....., revue, corrigée et augmentée de nouveaux documents et de notes nombreuses, etc., 1860-1868, 3 volumes in-4°,

« Rarement, dit le rapport de votre commission, le concours pour le prix Gobert a été aussi sérieux que cette année, rarement il a vu se produire des œuvres aussi remarquables. » Les mérites grands et divers des principaux ouvrages présentés ont rendu le classement difficile. La commission, dans ses propositions, et l'Académie, en les confirmant, ont pensé, dit le rapporteur, que l'importance et la difficulté du sujet, l'esprit critique, l'originalité des vues étaient le principal élément d'appréciation, et la mesure, pour ainsi dire, d'après laquelle les candidats devaient être jugés. » C'est à ce point de vue qu'elles se sont placées pour décerner les deux prix.

C'est un docte et important ouvrage, composé dans la seconde moitié du XVIIe siècle et demeuré inédit, l'Histoire des ducs de Bourbon et des comtes de Forez, par de la Mure, chanoine de Montbrison, qui fait le fond des trois volumes que M. de Chantelauze a publiés de 1860 à 1868. Jamais éditeur n'a rempli sa tâche avec plus de conscience à la fois et de savoir, au prix de plus d'efforts et de sacrifices. Le texte de la Mure a été fidèlement reproduit; mais, page par page, il est accompagné de notes qui le surpassent de beaucoup en étendue, qui le complètent, l'éclaircissent et le rectifient, et dont un certain nombre sont, au lieu de simples notes, de remarquables morceaux d'histoire, entremêlés fort souvent de pièces inédites. Le troisième volume ajoute plus de cent vingt documents à ceux que de la Mure avait recueillis pour servir de preuves à son livre. Il se termine par des dissertations dont plusieurs font beaucoup d'honneur à l'érudition de M. de Chantelauze.

Je viens de montrer combien est digne d'estime cette œuvre considérable; mais on peut en même temps conclure de ce qui précède quel en est le côté faible. « Le fond en appartient en propre, dit encore le rapport de votre commission, au chanoine de la Mure; M. de Chantelauze n'a rempli que le rôle d'annotateur et d'éditeur, rôle utile sans doute, mais secondaire, et qu'on ne saurait comparer à celui de l'écrivain qui conçoit lui-même un plan et qui l'exécute. »> Je ne mentionne pas un petit nombre de critiques se rapportant à telle ou telle partie des additions de l'auteur.

L'Ethnogénie gauloise nous transporte par son sujet dans une région d'étude qui a pour notre histoire un très-grand intérêt, mais fut longtemps cultivée d'une façon si chimérique, si fantastique, qu'on y appliquait à bon droit le nom de Celtomanie. Là aussi les découvertes de notre âse ont eu les plus heureux effets. Elles n'ont certes pas dissipé toutes les ténèbres; mais, au point de vue où elles nous placent, elles ont, dans quelques parties de l'ensemble, changé la nuit en un crépuscule, que percent même, par moments, çà et là, de lumineux éclairs. Grâce aux travaux modernes de Pictet, de Bopp, grâce au précieux répertoire grammatical de Zeuss (je ne parle que de ceux qui firent dans la voie les premiers pas bien décidés, mais ils ont eu et ont encore de zélés continuateurs), nous savons maintenant que les Celtes sont de race et de langue aryennes. A l'analyse de leur idiome, dans le passé, dans le présent, a été appliquée la sage et sûre méthode que nous fournit la grammaire comparative. Pour les autres aspects que présente l'étude des races, la critique historique, si per

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fectionnée à certains égards, et, avec raison, devenue si exigeante, a prêté ses puissants et prudents instruments. On ne peut faire un mérite a un auteur de venir à propos, au moment favorable, d'être porté en avant par le courant même, pas plus qu'a la barque de l'impulsion qu'elle reçoit du fleuve, de la route qui marche, comme dit Pascal. Mais ce qui est un mérite, c'est de seconder la pente et de hâter le mouvement, en maniant bravement la rame, en manœuvrant habilement la voile. C'est ce qu'a fait M. de Belloguet. Son livre est le fruit du labeur le pins opiniâtre. Il y montre une science trèsprofonde, puisée aux meilleures sources. Rien de ce qui chez les anciens se rapporté à son sujet, rien (ou bien peu s'en faut) de ce qui s'y rapporte chez les modernes de toute langue, ne lui a échappé. Sa première partie est le glossaire des mots gaulois cites par les écrivains de l'antiquité; la seconde est consacrée à l'étude anthropologique des races qui ont anciennement occupé le sol de la Gaule; la troisième, qui a paru depuis peu, traite de la religion, des mœurs et des institutions des Gaulois. « A la vaste érudition dont nous avons parlé, M. de Belloguet joint, dit le rapport, que je ne puis mieux faire que de citer de nouveau, un jugement libre de tout préjugé. Il circule avec une entière indépendance au milieu des hypothèses et des erreurs innombrables qu'une matière aussi épineuse n'a pu manquer de susciter. Il n'est séduit ni par l'autorité d'un nom ni par le prestige d'une tradition, quand une opinion, une tradition ne lui paraissent pas justifiées. Habile à interpréter les témoignages anciens, il sait tirr souvent du rapprochement des textes des lumières inattendues, soit pour réfuter ses adversaires, soit pour établir ses propres conclusions.

Après ces justes éloges, votre commission, avec une impartialité qui leur donne plus de prix, fait aussi la part de la critique. L'auteur, si sévère pour beaucoup de conjectures de ses devanciers, n'a pas toujours évité lui-même les assertions hasardées, les interprétations qu'on peut dire arbitraires. D'un autre côté, la forme de l'ouvrage laisse à désirer, non pour le plan général, la méthode de l'ensemble, mais pour l'ordonnance partielle de plus d'un chapitre. Enfin, pour la langue, le style, la correction, le goût, une sévère et dernière révision n'eût pas été inutile. Ce sont là, dit-on, des qualités accessoires en matière d'érudition dans de certaines bornes, je le veux bien. Aussi peut il arriver a l'Académie de pousser assez loin l'indulgence à cet égard, mais toutefois sans qu'elle oublie jamais les belles et bonnes traditions de l'érudition française, sans qu'elle oublie surtout combien importent à ce genre d'écrits, dans l'intérêt de la science même, la clarté, autant que la comporte le sujet, et la précision, et, dans l'intérêt des lecteurs et par conséquent de la propagation de la science, sinon toujours l'élégance (tout genre d'écrits a cependant la sienne), au moins la correcte et sobre aisance.

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En somme, malgré nos réserves, de très-sérieux mérites recommandent les trois volumes de M. le baron de Bellogue à l'attention des historiens et des érudits Avant et depuis le concours, plus d'un suffrage honorable, en France et hors de France, s'est`joint au vôtre.

C'est aussi aux études gauloises, à une branche toute neuve du vieux tronc celtique, dont la rapide croissance honore la liste actuelle de notre Académie en la personne de plusieurs dignes et savants confrères, qu'a été accordé cette année le prix de numismatique fondé par M. Allier de Hauteroche.

Deux ouvrages avaient été envoyés au concours : l'un, de M. Blancarl, ayant pour titre Recherches sur les monnaies de Charles II, comte de Provence; l'autre de M. Eugène Hucher, l'Art gaulois, ou les Gaulois d'après leurs médailles.

Les recherches de M. Blancart, déjà présentées en manuscrit l'an dernier, doivent se composer d'une dizaine de cahiers, dont un seul est imprimé. La commission, tout en les jugeant très-dignes de son attention, les a écartées, cette année, du concours, par cette raison que l'impression en est à peine commencée. C'est la détermination qu'elle a déjà adoptée au sujet du livre de M. le baron d'Ailly, sur les Monnais de la république romaine.

La commission a décerné le prix à l'ouvrage de M. Hucher, qu'elle considère comme un travail excellent, « un vade-mecum désormais indispensable à quiconque voudra se livrer à l'étude des antiques monnaies de la Gaule. »

L'affinité est étroite entre la numismatique et l'épigraphie. Celle-ci a fait, de nos jours, tant en Italie et en Allemagne qu'en France, les plus notables progrès, et s'est mise, avec autant de suite et d'ensemble que de sagacité, au service des études historiques. Bien des traits de lumière ont jailli d'elle sur l'organisation administrative, militaire, c vile et religieuse, et sur toutes les coutumes au monde ancien. C'est une mine qui est loin d'être épuisée. Même à se borner à l'antiquité grecque et romaine, le travail est devenu assez considérable pour qu'il ait paru sage de recourir, dans chacune d'elles, à cet utile procédé des temps modernes qui s'appelle la division du travail, à scinder, par exemple, la tâche, pour ne citer qu'un mode de partage, en inscriptions profanes et chrétiennes.

Pour ne parler que de la France, jamais, je crois, notre Académie, et par les épigraphistes qu'elle compte parmi ses membres, et par les intéressants travaux qu ils lui communiquent, n'a meux justifié son ancien nom d'Académie des inscriptions, en prenant, il est vrai, ce mot d'inscriptions dans un autre sens que celui qu'il avait dans notre première constitution A l'étude des inscriptions des deux antiquités classiques, nous avons joint, il y a deux ans, celle de l'épigraphie sémitique. Les travaux de la commission instituée en vue de rédiger le corps de cette partie des inscriptions orientales ont donné tout d'abord et donnent de plus en plus les meilleures espérances.

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Ce qui m'a amené à parler ici de l'épigraphie, c'est un mémoire où elle joue ingénieusement son rôle, un mémoire bien conçu, élégamment rédigé envoyé à l'Académie par M. Vidal-Lablache, élève de secoude année de l'école d'Athènes. Selon l'usage, un rapport imprimé à part rend compte de ces envois de cette école je n'ai donc point à y insister ici. Je me bornerai à quelques mots sur le mémoire dont je viens de parler. Il a pour titre : Hérode Atticus, Ce grand lettré, fameux par sa richesse et par le splendide usage qu'il en fit, n'est pas, il est vrai, un de ces hommes dont le nom intéresse sérieusement l'histoire; mais, en construisant sa biographie avec un soin très-attentif, M. Vidal-Lablache, qui a appliqué à son sujet d'excellentes qualités d'esprit, a utilement éclairé quelques aspects de la vie publique et privée à Rome et en Grèce. Dans le champ de l'antiquité classique, gardons-nous bien de décourager les glaneurs : ils ont trouvé plus d'une fois de riches et féconds épis. Il y a parmi les maîtres des études épigraphiques de fort bons esprits Nous nous en rapportons à eux pour apprendre à leurs disciples à

ne point exagérer la valeur des découvertes, et, tout en n'en négligeant aucune (les plus insignifiantes peuvent, par leurs conséquences, devenir importantes), en les mettant toutes en réserve, à ne point placer sur la même ligne, au moment où elles se font, les grandes et les petites.

La commission des Antiquités de la France a décerné, cette année, la première des récompenses dont elle dispose à un ouvrage consacré aux origines de notre idiome, au Dictionnaire critique et historique de l'ancienne langue française, depuis ses premiers débrouillements jusqu'à la formation de la langue moderne, par M. Frédéric Godefroy. Če travail est le fruit de vingt années de persévérantes recherches et honore infiniment l'infatigable patience, l'ardente énergie de son auteur, qui, en même temps, y aura l'occasion de faire preuve, tant dans l'ensemble que dans les détails, des diverses aptitudes que demande un tel travail. Il en a soumis à la commission la lettre A, entièrement mise au net, comme un spécimen, déjà considérable en lui-même et propre à montrer ce que sera toute la suite; car il est dans la nature même d'une œuvre de ce genre que les matériaux se réunissent et se classent à la fois pour toute une série alphabétique. Entreprendre la composition de ce dictionnaire, c'était répondre (et cette considération a pesé d'un grand poids, sans aucun doute, dans le jugement de la commission) à une invitation que, depuis longtemps, l'Académie répète chaque année. Elle s'étonnait peu qu'on ne se hâtât point de s'y rendre. A peine semblait-il qu'on pût attendre l'accomplissement d'une si lourde tâche de l'action collective a'un groupe d'érudits, officiellement secondés et soutenus. Je n'ai pu m'empêcher de dire en peu de mots combien doivent paraître dignes d'encouragement le zèle, le dévouement de M. Godefroy; mais ce n'est point à moi d'apprécier dans ce discours son travail. La commission le juge et en montre les mérites, et les améliorations qu'elle y désirerait, dans un rapport détaillé, qui sera imprimé et distribué.

A l'occasion de l'appel de l'Académie et du vaste projet de M. Godefroy qui en a été la suite, je dirai que ce qui me frappe, au point de vue où je me suis placé dès le commencement de ce discours, c'est le haut degré où, dans cette partie encore, je veux dire dans l'analyse et le classement historique des grands trésors des idiomes, le labeur érudit, aidé des plus puissants dons de l'esprit, est parvenu de notre temps. On peut dire que nous avons vu naître, au sens exaci, étendu, compréhensif, qu'ont aujourd'hui ces mots, et l'histoire et la science du langage. La lumière venue de l'Orient a éclairé d'un jour tout nouveau, dans notre Europe, non pas seulement les sœurs antiques du sanscrit et du zend, les sœurs depuis longtemps mortes, disons mieux, continuant de vivre, dans les anciens écrits, d'une vie impérissable; mais aussi les enfants survivants de ces sœurs. Elle a fait plus, elle a comme régénéré l'étude des langues en général, non pas uniquement d'une famille, mais de toutes, en étendant, rectifiant, aiguisant notre vue, en nous déshabituant de deviner, de conjecturer au hasard, en assurant enfin notre marche, guidée désormais par les sûrs et féconds et rigoureux instruments qui s'appellent l'observation, l'induction, la comparaison. Rappeler cet admirable progrès, c'est redire la gloire (je ne parle que des plus éminents parmi ceux qui ne sont plus, et tais les doctes et habiles contemporains), la gloire des Guillaume de Humboldt, des Colebrooke, de notre illustre Burnouf, de cet autre savant vénérable que j'ai déjà nommé et dont vous

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