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qu'il s'en présentera de bonne volonté, afin de passer avec lui aux terres et îles par lui précédemment découvertes au nom et par le commandement de Sa Majesté. Anghiéra nous apprend que Cabot fit lui-même les frais d'armement de deux navires (du is sibi navigia propria pecunia in Britannia ipsa instruxit); trois autres furent armés par des marchands, et les comptes de la cassette du roi permettent de recueillir, à cet égard, les noms de Lancelot Thirkill, de Thomas Bradley, et de Jean Carter.

Quelle que soit la raison qui vint, au moment décisif, mettre obstacle à ce que Jean Cabot conduisit lui-même l'expédition disposée en vertu des lettres royales délivrées à son nom personnel (on peut conjecturer assez plausiblement que cette raison ce fut sa mort inopinée), la clause de style qui lui substi ́tuait éventuellement son représentant dûment autorisé trouva en cette circonstance son application effective, et ce fut son fils Sébastien, alors âgé de vingt-cinq ans selon mon estime, qui prit, au lieu et place du titulaire, le commandement de la petite flotte de cinq navires portant trois cents hommes et approvisionnée pour un an, qui partit de Bristol au commencement de l'été (in the beginning of summer), c'est-à-dire approximativement le 21 juin, dans le but d'aller coloniser les terres transatlantiques où l'Angleterre venait de planter son drapeau, et avec l'espoir de pénétrer au delà jusqu'à la région des épiceries (pensa da quello loco occupato andarsene sempre a riva più verso et levante, tanto che'l sia al opposito de una isola da lui chiamata Cipango posta in la regione equinoctiale, dove crede che nascano tutte le speciarie del mondo). Un coup de vent les assaillit au départ, et l'un des navires, fort maltraité par la tempête, fut obligé de se réfugier en Irlande; mais les autres continuèrent leur route. On arriva en vue de terre plus tôt qu'on ne s'y attendait, par une hauteur d'environ 45°; on suivit d'abord la côte, qui se prolongeait au nord, et l'on alla ainsi jusque vers 55°, 56° ou 58°; la côte alors semblait tourner à l'est, et quoiqu'on fût au mois de juillet, on rencontra de telles masses de glaces que l'on fut obligé de virer de bord; on relâcha, pour se refaire, à la Terre des Bacallaos, que Cabot appela ainsi d'après l'abon

dance des gros poissons auxquels les indigènes donnaient ce nom; il redescendit ensuite la côte au sud-ouest jusque vers la hauteur du détroit de Gibraltar, par une longitude à peu près égale à celle de la pointe de Cuba; et de là, se trouvant à court de vivres, il reprit la route d'Angleterre; on l'y attendait dès le mois de septembre, mais il n'y était pas encore rentré à la fin d'octobre. Sa campagne avait eu peu de succès : il avait, dit-on, perdu la majeure partie de son monde, et n'avait pu découvrir de passage pour arriver au pays des épices comme il l'avait annoncé: aussi ne reçut-il à son retour qu'un froid accueil, qui ne lui laissa que de tristes souvenirs.

Il se fait alors un long silence sur ce qu'il advint de lui. Continua-t-il à son compte d'autres voyages? Prit-il quelque part à ceux que firent de nouvelles associations mercantiles où étaient admis des Portugais des Açores, et qui obtinrent des lettrespatentes de concession, d'abord le 19 mars 1504, puis le 9 décembre 1502? Le champ est ouvert à la conjecture, mais nul indice de quelque valeur ne s'est encore produit; et mieux vaut sauter à pieds joints par dessus cette lacune historique.

Il est un fait secondaire, afférent à l'année 1502, annoté par le chroniqueur Fabian, et que Hakluyt a, de son chef, mis sur le compte de Cabot, et que même il a ultérieurement, par inadvertance (si ce n'est simplement un lapsus typographique), attribué à l'année 1499, savoir, la présentation, au roi, de trois sauvages ramenés de Terre-Neuve; mais l'équivoque se découvre en remontant à la source, et l'on reconnaît bientôt que c'est à l'association de 1501 qu'il faut restituer le fait du transport en Angleterre de ces trois sauvages.

Le renom de Sébastien Cabot n'était point resté concentré dans les îles Britanniques; dès longtemps les correspondances officielles des ambassadeurs l'avaient signalé à la cour d'Espagne; peut-être cherchait-il lui-même de ce côté une revanche de l'indifférence et de l'oubli dont on payait ses services en Angleterre. Lorsqu'après la mort de Henri VII, son successeur, devenu le gendre de Ferdinand le Catholique, fut entré dans la ligue de 4514 contre la France, pendant que Jacques d'Ecosse

embrassait le parti opposé, Cabot se tourna résolument vers l'Espagne, et Ferdinand écrivit, le 13 septembre 1512, à lord Willoughby, commandant en chef des troupes anglaises transportées en Italie par la flotte espagnole, pour lui demander de lui envoyer le navigateur vénitien (qui sans doute se trouvait en ce moment à sa disposition), ce qui se fit sans difficulté. Sébastien Cabot, venu en Castille, y reçut aussitôt, par cédule royale datée de Logroño, le 20 octobre 1512, le grade de capitaine, aux appointements de 50,000 maravédis, avec Séville pour résidence en attendant ses ordres. C'est là qu'il se lia avec le célèbre conseiller des Indes, Pierre-Martyr d'Anghiéra, qui le recevait familièrement chez lui, le logeait parfois sous son toit, et avec lequel il se trouvait en cour (concurialis noster) vers la fin de 1515, dans l'attente des résolutions royales touchant une expédition projetée pour le mois de mars de l'année suivante. Mais Ferdinand mourut le 23 janvier 1516, avant que les dispositions nécessaires eussent été faites pour l'expédition projetée, et Cabot obtint aisément sans doute un congé pour se rendre en Angleterre, en attendant que le jeune successeur du roi défunt fût venu prendre possession de l'héritage qui lui était échu."

Le célèbre navigateur avait-il déjà reçu, de la part de Henri VIII, ou de son chancelier le cardinal Wolsey, quelque favorable ouverture? Toujours est-il que, longtemps après, dans une épître dédicatoire à très-haut et très-puissant prince Sa Grâce le duc de Northumberland, précédant la version anglaise d'un extrait de la Cosmographie de Sébastien Munster (1553), son poore Orator, Richard Eden, rappelle qu'en la huitième année, environ, du règne de Henri VIII (laquelle est à compter du 22 avril 1516 à pareil jour de 1517), ce monarque avait équipé et expédié certains navires sous la conduite de Sébastien Cabot et de sir Thomas Pert, dont le manque de courage fut cause que le voyage n'eut point de résultat. Ramusio de son côté, dans une épître à Fracastoro, servant de préface au troisième volume de son recueil de Navigationi et viaggi (1556), rappelle que Sébastien Cabot lui avait autrefois écrit s'être avancé au nord, le long de la côte transatlantique, jusqu'à 62o 1/2 de lati

tude septentrionale, où il se trouvait le 12 juin, ayant devant lui la mer libre, et croyant fermement possible de passer par cette voie jusqu'au Catay; ce qu'il aurait, disait-il, exécuté, si l'opposition du patron et des matelots révoltés ne l'eût forcé à rebrousser chemin. Il était amplement déjà fait allusion à cette entreprise avortée dans un mémoire adressé au roi Henri VIII, en 1527, par Robert Thorne, marchand anglais établi à Séville, qui prêche l'exploration des routes du nord avec une ardeur qu'il déclare avoir héritée de son père (le vieux Nicolas Thorne ?), associé de Hugues Eliot de Bristol, découvreurs, eux aussi, des TerresNeuves, par lesquelles, on le sait maintenant, si les marins avaient été dociles et avaient suivi les desseins de leur pilote, on aurait gagné les Indes occidentales d'où vient l'or. Tout cela a été parfaitement exposé, il y a presque une quarantaine d'années, par votre docte et sagace compatriote Richard Biddle de Pittsburg, Pensylvanie, dont le livre sur Sébastien Cabot, tout suranné qu'il est en certaines parties, n'en conserve pas moins une valeur considérable, et me semble donner, sur plusieurs points, notamment sur celui-ci, la solution à laquelle il faut s'en tenir.

Au retour de cette expédition, Cabot revint sans doute immédiatement en Espagne, où il ne tarda point d'être nommé pilote major, par cédule royale datée de Valladolid le 5 février 1518, avec un traitement additionnel de 50,000 maravédis, plus 25,000 maravédis à titre d'indemnité de dépenses (ayuda de costa), recevant ainsi en total un salaire annuel de 125,000 maravédis, équivalant à environ 300 ducats.

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Cependant il était encore l'année suivante, en vertu d'un congé, en Angleterre, où il recevait du cardinal Wolsey des offres avantageuses pour conduire une nouvelle expédition de découvertes, en vue de laquelle les navires étaient presque parés, avec 30,000 ducats destinés aux besoins de l'entreprise. I répondit que, dans sa position au service du roi d'Espagne, il ne pouvait, sans la permission formelle de celui-ci, accepter cette proposition; et, comme il avait en tête d'autres visées, il eut soin

de provoquer secrètement son rappel, et vint reprendre en Espagne l'exercice de ses fonctions.

Là se termine tout ce qui, dans la carrière de Sébastien Cabot, appartient aux navigations terreneuviennes, et quelque intérêt que puisse avoir pour son biographe le reste d'une vie qui se prolongea près de quarante années encore dans une incessante activité, l'Amérique du nord n'a plus à y chercher d'autres lambeaux de sa propre histoire. Ici donc doit aussi s'arrêter ma réponse à la question sur laquelle vous m'avez fait l'honneur de provoquer de ma part un nouvel examen.

Vous voyez que, sauf quelques détails secondaires sur lesquels une étude plus attentive a rectifié mes premières déterminations, j'ai trouvé dans les documents exhumés, en ces dix dernières années, des archives d'Italie, d'Espagne et d'Angleterre, une précieuse confirmation de ce que vous vouliez bien appeler ma plausible théorie. Chacune des quatre campagnes de découvertes que j'avais distinguées dans mes notices de 1857 et de 1863, se trouve présenter, en effet, quelque trait caractéristique servant à la différencier des trois autres. Et d'abord il faut les classer en deux groupes, l'un pour la part de Jean Cabot, l'autre pour la part de Sébastien; puis, venant aux distinctions spéciales:

Dans la part de Jean Cabot (qui avait avec lui son fils):

La première campagne (qu'avaient déjà précédée plusieurs tentatives infructueuses dont nous devons la révélation aux fouilles de M. Bergenroth dans les archives de Simancas) est directement attestée par le témoignage irrécusable de Sébastien Cabot, qui ne prétend à rien de plus, cette fois, qu'à une première vue de terre, avec une île située tout auprès, à la date du 24 juin 1494;

La seconde campagne, qui a duré du commencement de mai au commencement d'août 1497, est caractérisée par une avigation de trois cents lieues le long d'une côte dont le dessin contemporain, reproduit sur la carte monumentale de Jean de la Cosa, nous montre la bannière britannique au Cap d'Angleterre (que l'on dut atteindre dès la fin de mai 1497, ou au plus tard ANNÉE 1869.

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