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de l'esprit humain, un dans son essence et dans ses opérations, ont dû être les mêmes sur les bords du Gange et sur les bords de l'Euphrate sur ce point M. DE VOGUE n'a pas de faits à invoquer, mais il en appelle au jugement des indianistes et particulièrement à celui du Président, M. Adolphe Regnier, auquel il a hâte de céder la parole.

M. RENAN ne veut ajouter qu'un simple mot à ce qu'il a dit déjà. Il admet parfaitement chez les peuples sémitiques et ailleurs que la multiplicité des noms divins a pu donner naissance à un polythéisme plus ou moins apparent, plus ou moins développé. Mais ce fait se concilie à ses yeux avec cet autre grand fait que reconnaît l'ethnographie, de groupes distincts de peuples ayant des instincts particuliers et des aptitudes diverses. C'est ce qui constitue, en religion comme en tant d'autres choses, les directions différentes de leur génie, ici plus porté à s'épanouir en formes infiniment variées, là à se concentrer en un cercle étroit d'institutions et de croyances, à se constituer en une individualité étroite et forte.

M. RAVAISSON, qui s'était réservé la parole à la fin de la séance précédente, sans revenir sur ce qu'il n'a pu qu'indiquer imparfaitement du génie propre de certaines races, attesté par leurs croyances, surtout de la race qualifiée par lui d'Indo-hellénique, voudrait arriver à quelques résultats historiques, et, en posant certaines questions, tâcher d'établir quelques faits dominants. Il se demande si les caractères généraux des religions sont aussi distincts de groupe à groupe ethnographique qu'on l'a prétendu : d'une part, le monothéisme; d'autre part, le polythéisme; si tel peuple s'est formé de la divinité une idée complètement à lui; ce qu'il faut entendre précisément par les cultes naturels et surnaturels. Pour ce qui le concerne, il se bornera à ce qu'il a étudié, l'antiquité grecque, indiquant seulement quelques rapprochements avec l'Inde. Il croit pouvoir s'inscrire en faux contre l'idée que le culte des Védas se bornerait à l'adoration exclusive des forces naturelles; ce culte, à le prendre dans son ensemble, est plus supernaturaliste qu'on ne l'a prétendu. Il en est de

même chez les Grecs, en dépit des interprétations stoïciennes de Chrysippe et autres. Dans les monuments les plus anciens, dans Homère et dans Hésiode que trouvons-nous? Dès l'origine, à côté des forces de la nature divinisées, et dans ces forces ellesmêmes, des intelligences, des volontés, des personnes. Le Destin lui-même qui paraît dominer les dieux n'est pas une force aveugle, une force matérielle, et ce qui est éminemment caractéristique pour les croyances grecques dans leur plein développement, ce qu'on a montré récemment dans un livre remarquable, c'est que la tragédie grecque se fonde sur l'idée de la justice, bien plus que sur celle de la fatalité comme nous l'entendons. Chez les Grecs aussi on peut soutenir jusqu'à un certain point que le monothéisme préexista, non pas tel que nous le concevons, il est vrai, mais comme une confuse unité qui contient dans son sein les principes de la nature et ceux de l'esprit, mais où l'intelligence domine. En résultat, la religion grecque fut par dessus tout une religion de lumière faite à l'image du peuple grec lui-même, et il est douteux que ce grand peuple ait commencé par le naturalisme, comme on l'entend d'ordinaire.

M. REGNIER, Président, à qui M. de Vogüé et d'autres membres ont fait appel pour ce qui est de la religion védique, tàchera de se borner aux faits positifs, en écartant les inductions et les spéculations philosophiques que l'on y a trop souvent mêlées. Les hymnes du Rig-Véda, le plus ancien monument littéraire de la race aryenne, appartiennent à des époques différentes, quoique, dans la suite des temps, on en ait ramené la langue à une certaine uniformité. Ce n'est point une collection liturgique, où il faille chercher une théologie proprement dite, encore moins une philosophie, c'est par dessus tout un livre historique, où l'état relativement primitif des Aryas de l'Inde nous est représenté dans des chants lyriques, dont le sujet principal, mais non pas exclusif, est la religion. Ces chants ne sont point, comme parfois on se le figure, de premiers bégaiements: ils nous montrent un état de société qui déjà présuppose un long temps de culture. La matière la plus antique des Rishis ou chantres védiANNÉE 1869.

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ques, c'est la description poétique, inspirée, des phénomènes d'abord, puis des forces physiques. Les personnifications, les adorations viennent plus tard, et, dans une déification croissante, les divers attributs de la divinité, conçus d'abord d'une manière très-générale, se spécialisent en des dieux multiples, qui rentrent fréquemment les uns dans les autres, et, par la ressemblance de leurs caractères et de leur rôle, paraissent parfois se confondre, malgré la diversité des noms, dans une primordiale unité. M. REGNIER, qui çà et là a invoqué l'autorité de plusieurs indianistes éminents et a cité particulièrement les plus récents travaux de MM. Max Müller et Muir, expose ensuite une thèse ingénieuse de M. Roth, qui, au-dessus de ces divínités imparfaitement distinctes, montre un dieu, Varouna, d'un caractère plus élevé que tous les autres et qui paraît leur être antérieur, comme l'Ouranos des Grecs, qui est le même par le nom, Varouna, le premier des Asouras, le pur esprit, identique avec l'Ahoura Mazda, Ormuzd des Iraniens. Ce Varouna, dans des hymnes remarquables et qui paraissent être fort anciens, est l'auteur des lois du monde physique et du monde moral à la fois, et si bien du monde moral, que l'idée du péché y apparaît clairement. Il a, comme le Zeus des Grecs dans Hésiode, ses espions, ainsi qu'ils sont nommés, chargés d'exercer sa surveillance sur tout ce qui se passe dans les trois mondes. Peu à peu Indra, le dieu de l'atmosphère, le Jupiter indien, prévaut sur Varouna, qui rentre dans l'ombre et déchoit, comme, chez les Grecs, Ouranos et Cronos. Plus tard encore, postérieurement à l'âge védique, on voit se former une trinité de dieux suprêmes, où domine la figure de Brahmâ, et au-dessus de laquelle s'élève la grande abstraction neutre, la cause et l'essence du monde Brahma.

«En résumé nous pouvons dire, ajoute en terminant M. REGNIER, que, dans les hymnes du Rig-Véda, nous trouvons mêlés, de manière toutefois que le premier élément domine, du polythéisme et du monothéisme. Avant l'époque védique, et nous avons dit qu'elle présuppose un long temps de culture, qu'était la religion? C'est là, si nous nous bornons au témoignage de nos

hymnes, un champ de spéculation, où l'on peut risquer bien des conjectures, bien des inductions et déductions. Mais si, comme on doit le faire dans une discussion scientifique, on s'en tient aux faits, le contenu du Véda ne peut nous apprendre, d'une façon tant soit peu positive et certaine, si ce qui a précédé et surtout ce qui a été le commencement est le monothéisme ou le polythéisme.

M. MAURY, qui avait demandé la parole, remet à la prochaine séance les observations qu'il a dessein de présenter sur la question soulevéepar la lecture de M. de Vogüé.

Sont adressés à l'Académie.

I. Pour le concours du prix Volney :

II.

1o De modo subjunctivo, dissertation grammaticale, historique et philosophique, par M. Arthur Loiseau, professeur au lycée d'Angers (1866, in-8°).

2o La langue primitive basée sur l'idéographie lunaire, etc., par M. A. De Vertus, vice-président de la Société historique et archéologique de Château-Thierry (4868,4 vol. in-8°.-2 ex.) Pour le concours des Antiquités de la France :

Hagiographie du diocèse d'Amiens, par M. l'abbé Corblet, t. I, Paris et Amiens, 1869, in-8°, avec une lettre.

III. A titre d'hommages:

1o Mémoires de la Société des antiquaires de l'Ouest : année 1867; t. XXXII, 4 et 2° parties, 1868, in-8°.

2o Bulletin de la même Société : 4o trimestre de 1868, in-8°. 3o Bulletin de la Commission des antiquités de la Seine-Inférieure: année 1867, t. I, 4re livr.

4° Revue archéologique : mars 1869.

50 M. REGNIER fait hommage, au nom de l'auteur, de l'ouvrage intitulé « Grammaire de la langue zende,» par M. Abel Hovelacque, 1869, grand in-8°.

Séance du mercredi 24.

PRÉSIDENCE DE M. REGNIER.

Le procès-verbal de la séance précédente est lu et la rédaction en est adoptée.

Il est donné lecture de la correspondance officielle.

Par un message du 20 mi rs, M. le Ministre de l'Instruction publique adresse à l'Académie, sur l'avis de la section d'archéologie du Comité des travaux historiques, l'estampage d'une inscription numidico-punique gravée sur une stèle découverte aux environs de Koudiat-Ati, près de Constantine. M. Féraud, à qui cet envoi est dû, y a joint un dessin transmis également à l'Académie avec un extrait certifié de sa lettre. Ces documents sont renvoyés à l'examen préalable de MM. Renan et de Vogüé, qui en feront un rapport à la Commission des inscriptions sémitiques.

Par un second message du 23 courant, M. le Ministre transmet ampliation d'un arrêté en date du 15 mars, en vertu duquel le diplôme d'archiviste-paléographe est conféré à 17 élèves de l'Ecole impériale des Chartes.

L'arrêté est ainsi conçu :

Le Ministre secrétaire d'Etat au département de l'Instruction publique,

Vu l'art. 47 de l'ordonnance royale du 31 décembre 1846,

Vu la liste des élèves sortants de l'Ecole impériale des Chartes dressée, le 1er février 1869, par le Conseil de perfectionnement de ladite école,

Arrête :

Art. I. Sont nommés archivistes-paléographes, dans l'ordre de mérite suivant, savoir :

MM.

1° Aubry-Vitet (Pierre-Jean-Eugène), né le 20 décembre 1845, à Paris (Seine).

2o De Pontmartin (Auguste-Henri-Jean-Marie), né le 20 août 1844, à Avignon (Vaucluse).

3o Pelletan (Charles-Camille), né le 23 juin 1846, à Paris (Seine). 4° Héron de Villefosse (Antoine-Marie-Albert), né le 8 décembre 1845, à Paris (Seine).

5o Pannier (Léopold-Charles-Augustin), né le 15 avril 1842, à Paris (Seine).

60 Herbet (Marie-Pierre-Félix), né le 28 septembre 1847, à Amiens (Somme).

7o Le Roux (Fernand-Louis-Arnould), né le 1er octobre 1844, à Saint-Quentin (Aisne).

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