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cherchaient à anéantir le christianisme, pour y substituer leurs folles pensées et leurs extravagantes rêveries.

Ils s'adressaient à toutes les passions, savaient employer tous les ressorts, toucher à toutes les cordes sensibles.

Celui-ci évoquait la vieille Rome tout éplorée et regrettant ses dieux évanouis; il rappelait ces temps antiques où le culte de Jupiter étalait dans la ville souveraine ses augustes solennités et ses pompes triomphales, il plaidait la cause de ces divinités usées et cherchait à réveiller en leur faveur le patriotisme assoupi des Romains; puis, après une longue énumération de héros, de conquêtes, de vertus et de nobles exemples, il demandait insolemment ce que pouvait enfanter de semblable la secte nouvelle avec ses dogmes étrangers et ses bizarres superstitions.

Celui-là cherchait à capter les intelligences ennemies de tout frein; il réclamait à haute voix l'affranchissement de la raison que le christianisme voulait asservir à d'absurdes croyances, il ridiculisait ces dogmes sévères que l'Evangile imposait à la foi, et, dans son rationalisme orgueilleux, il en appelait à la dignité de l'homme de tout ce qui lui semblait, à lui, une violation des droits les plus sacrés.

Un autre, adulateur insidieux, représentait les Chrétiens comme des conspirateurs obscurs, es

pèce de société à part qui s'isolait des intérêts publics, qui abjurait les souvenirs de la patrie, qui ne portait qu'avec impatience le joug des empereurs, et qui marchait à la conquête d'un avenir merveilleux, dont la réalisation tendait à effacer du monde et l'empire et la gloire de Rome. Plusieurs allaient jusqu'à transformer en une sorte de puissance magique le christianisme, qui chaque jour leur enlevait des adeptes; quelques-uns ne voyaient dans le courage héroïque des martyrs qu'un sombre fanatisme plus capable d'inspirer l'horreur que d'émouvoir la pitié; d'autres attribuaient à je ne sais quelle apathie ces abnégations sublimes, ces renoncemens surhumains que stoïcisme n'avait pas même soupçonnés.

le

A tant d'inculpations diverses, les fidèles n'opposaient qu'un héroïque silence ou le spectacle plus héroïque encore de leurs vertus: soldats invincibles, ils se montraient aussi courageux dans les combats qu'intrépides dans les supplices; c'étaient les légions chrétiennes qui seules retraçaient la valeur des antiques Romains, et qui retardaient encore la chute de l'empire tout prêt à s'écrouler sous les attaques redoublées des Barbares; citoyens irréprochables, ils payaient par des bienfaits les outrages qui leur étaient prodigués; ils apparaissaient comme des consolateurs au milieu des calamités, comme des anges de paix au sein des discordes publiques; les empe

reurs n'avaient pas de sujets plus fidèles, la patrie pas de plus fermes soutiens, les lois pas d'observateurs plus exacts; ils faisaient des vœux pour la prospérité de l'empire qui les eût voulu rejeter de son sein, pour le salut des maîtres qui les proscrivaient chaque jour, pour l'agrandissement de Rome qui les repoussait comme de coupables agitateurs. - Voilà pour le peuple chrétien.

Et les apologistes se présentaient en foule, désireux d'accepter le défi proposé; ils faisaient servir à la défense de l'Evangile tout ce que la philosophie avait de plus grave, tout ce que l'antiquité présentait de plus respectable, tout ce que l'histoire offrait de plus riche, tout ce que les mythes cachaient de plus profond; avec le flambeau d'une érudition imposante, ils remontaient les âges passés pour y chercher, par de longues et pénibles investigations, les dogmes catholiques altérés par le mensonge; ils mettaient à nu toutes les turpitudes des dieux païens, et puis ils se prenaient à rire de ces divinités prétendues; sous leur plume savante, on voyait le catholicisme dérouler ses titres d'ancienneté, et traverser les siècles, là, défiguré par l'orgueil, ici, jetant comme en témoignage de vie des lueurs brillantes, dans la personne des sages en qui il s'était incarné pour arriver à son entier développement. Leur éloquence avait quelque chose d'entraînant et de persuasif qu'on ne retrouvait pas dans leurs

antagonistes superbes ; avec eux s'étaient révélées au monde une nouvelle littérature et une philosophie nouvelle. Voilà pour les orateurs chrétiens.

Et le christianisme poursuivait sa marche gigantesque, balayant les vieilles institutions, entraînant dans sa course les idées et les mœurs, plantant son étendard sur les temples écroulés, et promenant par toute la terre son lumineux flambeau. Les oracles devinrent muets, les sanctuaires furent abandonnés, les dieux tombaient en discrédit, la philosophie ne compta plus qu'un petit nombre de sectateurs, et l'univers s'étonna de se trouver chrétien.

Dès lors une marche nouvelle est imprimée au christianisme; libre d'ennemis extérieurs, il va, comme la vieille Rome, en rencontrer de nouveaux pullulant dans ses entrailles; mais, impérissable qu'il est, on le verra triompher encore de ces attaques; il trouvera dans ses Hilaire, dans ses Augustin, dans ses Jérôme, des guerriers plus invincibles, certes, que les Pompée, les Marius et les Sylla; les hérésies n'apparaîtront que pour ajouter à sa gloire; des combats sans fin, mais aussi des victoires éclatantes s'apprêtent pour la tribune catholique.

Des hauteurs de l'histoire, tâchons d'embrasser d'un rapide coup-d'œil cette foule immense d'adversaires armés contre l'Eglise.

Au premier rang se trouvent les Gnostiques; ils marchent le front haut et le regard superbe; il y a dans leur tournure d'esprit et dans les maximes qu'ils débitent quelque chose de prestigieux qui pourrait imposer; ils respirent je ne sais quoi d'antique et d'oriental comme ces sages qui peuplent les rives du Gange, qui méditent sous le ciel de la Chaldée, ou qui rêvent dans les sanctuaires de la mystérieuse Egypte. Ils tentent d'allier avec la grave austérité du christianisme les hautes et larges doctrines de la sagesse asiatique. Ce qui les préoccupe, c'est l'origine des choses humaines, c'est l'essence de cet être impénétrable aux regards, mais accessible en quelque sorte à la pensée de l'homme, c'est le règne d'un principe de mal perpétuellement en opposition avec un principe de bien; ils s'agitent autour de cette énigme insoluble, ils vous bâtissent là-dessus mille systèmes plus ou moins ingénieux, plus ou moins concluans; ils vous jettent des paroles ambitieuses; ils vous parlent d'émanations successives, de générations incréées, de plérômes infinis. A force de sonder ces mystères, leurs pensées se sont égarées dans un vague ténébreux, ils sont descendus dans la profondeur de l'abîme, et déjà leur audace ne connaît plus de bornes.

Les Evangiles sont mutilés, les Ecritures tronquées, les faits de l'histoire judaïque attribués à de mauvais génies, les miracles du Christ expliqués

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