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cêtres; il est encore brave, sensible, généreux; ses mœurs modernes sont comme le souvenir de ses mœurs antiques : ce n'est plus, qu'on nous pardonne l'image, ce n'est plus la main du barde même qu'on entend sur la harpe : c'est ce frémissement des cordes produit par le toucher d'une ombre, lorsque la nuit, dans une salle déserte, elle annonçait la mort d'un héros.

Carril accompanied his voice. The music was like the memory of joys that are past, pleasant, and mournful to the soul. The ghosts of departed Bards heard it from Slimora's side. Soft sounds spread along the wood, and the silent valley of night rejoiced. So when he sits, in the silence of noon, in the valley of his breeze, the humming of the mountain's bee comes to Ossian's ear: the gale drowns it often in its course; but the pleasant sound returns again. « Carril accompagnait sa voix. Leur musique, pleine de douceur et de tristesse, ressemblait au souvenir des joies qui ne sont plus. Les ombres des Bardes décédés l'entendirent sur les flancs du Slimora. De faibles sons se prolongèrent le long des bois, et les vallées silencieuses de la nuit se réjouirent. Ainsi, pendant le silence du midi, lorsque Ossian est assis dans la vallée de ses brises, le murmure de l'abeille de la montagne parvient à son oreille; souvent le zéphyr, dans sa course, emporte le son léger, mais bientôt il revient encore. >>

CHAPITRE V

OTAITI

L'homme ici-bas ressemble à l'aveugle Ossian, assis sur les tombeaux des rois de Morven : quelque part qu'il étende sa main dans l'ombre, il touche les cendres de ses pères.

Lorsque les navigateurs pénétrèrent pour la première fois dans l'océan Pacifique, ils virent se dérouler au loin des flots que caressent éternellement des brises embaumées. Bientôt, du sein de l'immensité, s'élevèrent des îles inconnues. Des bosquets de palmiers, mêlés à de grands arbres, qu'on eût pris pour de hautes fougères, couvraient les côtes, et descendaient jusqu'au bord de la mer en amphithéâtre : les cimes bleues des montagnes couron

1 Drowns, noie.

GENIE DU CHrist.

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naient majestueusement ces forêts. Ces îles, environnées d'un cercle de coraux, semblaient se balancer comme des vaisseaux à l'ancre dans un port, au milieu des eaux les plus tranquilles : l'ingénieuse antiquité aurait cru que Vénus avait noué sa ceinture autour de ces nouvelles Cythères, pour les défendre des orages. Sous ces ombrages ignorés, la nature avait placé un peuple beau comme le ciel qui l'avait vu naître les Otaïtiens portaient pour vêtement une draperie d'écorce de figuier; ils habitaient sous des toits de feuilles de mûrier, soutenus par des piliers de bois odorants, et ils faisaient voler sur les ondes de doubles canots aux voiles de joncs, aux banderoles de fleurs et de plumes. Il y avait des danses et des sociétés consacrées aux plaisirs; les chansons et les drames de l'amour n'étaient point inconnus sur ces bords. Tout s'y ressentait de la mollesse de la vie, et un jour plein de calme, et une nuit dont rien ne troublait le silence. Se coucher près des ruisseaux, disputer de paresse avec leurs ondes, marcher avec des chapeaux et des manteaux de feuillages, c'était toute l'existence des tranquilles Sauvages d'Otaïti. Les soins qui, chez les autres hommes, occupent leurs pénibles journées, étaient ignorés de ces insulaires : en errant à travers les bois, ils trouvaient le lait et le pain suspendus aux branches des arbres.

Telle apparut Otaïti à Willis, à Cook et à Bougainville. Mais, en approchant de ces rivages, ils distinguèrent quelques monuments des arts, qui se mariaient à ceux de la nature : c'étaient les poteaux de Moraï. Vanité des plaisirs des hommes ! Le premier pavillon qu'on découvre sur ces rives enchantées est celui de la mort, qui flotte au-dessus de toutes les félicités humaines.

Donc ne pensons pas que ces lieux où l'on ne trouve au premier coup d'œil qu'une vie insensée, soient étrangers à ces sentiments graves, nécessaires à tous les hommes. Les Otaïtiens, comme les autres peuples, ont des rites religieux et des cérémonies funèbres; ils ont surtout attaché une grande pensée de mystère à la mort. Lorsqu'on porte un cadavre au Moraï, tout le monde fuit sur son passage; le maître de la pompe murmure alors quelques mots à l'oreille du décédé. Arrivé au lieu du repos, on ne descend point le corps dans la terre, mais on le suspend dans un berceau qu'on recouvre d'un canot renversé, symbole du naufrage de la vie. Quelquefois une femme vient gémir auprès du Moraï; elle s'assied les pieds dans la mer, la tête baissée, et ses cheveux retombant sur

son visage : les vagues accompagnent le chant de sa douleur, et sa voix monte vers le Tout-Puissant avec la voix du tombeau et celle de l'océan Pacifique.

CHAPITRE VI

TOMBEAUX CHRÉTIENS

En parlant du sépulcre dans notre religion, le ton s'élève et la voix se fortifie on sent que c'est là le vrai tombeau de l'homme. Le monument de l'idolâtre ne vous entretient que du passé; celui du chrétien ne vous parle que de l'avenir. Le christianisme a toujours fait en tout le mieux possible; jamais il n'a eu de ces demi-conceptions, si fréquentes dans les autres cultes. Ainsi, par rapport aux sépulcres, négligeant les idées intermédiaires, qui tiennent aux accidents et aux lieux, il s'est distingué des autres religions par une coutume sublime : il a placé la cendre des fidèles dans l'ombre des temples du Seigneur, et déposé les morts dans le sein du Dieu vivant.

Lycurgue n'avait pas craint d'établir les tombeaux au milieu de Lacédémone; il avait pensé, comme notre religion, que la cendre des pères, loin d'abréger les jours des fils, prolonge en effet leur existence, en leur enseignant la modération et la vertu, qui conduisent à une heureuse vieillesse. Les raisons humaines qu'on a opposées à ces raisons divines sont bien loin d'être convaincantes. Meurt-on moins en France que dans le reste de l'Europe, où les cimetières sont encore dans les villes?

Lorsque autrefois parmi nous on sépara les tombeaux des églises, le peuple, qui n'est pas si prudent que les beaux esprits, qui n'a pas les mêmes raisons de craindre le bout de la vie, le peuple s'opposa à l'abandon des antiques sépultures. Et qu'avaient en effet les modernes cimetières qui pût le disputer aux anciens ? Où étaient leurs lierres, leurs ifs, leurs gazons nourris depuis tant de siècles des biens de la tombe? pouvaient-ils montrer les os sacrés des aïeux, le temple, la maison du médecin spirituel, enfin cet appareil de religion qui promettait, qui assurait même une renaissance très-prochaine? Au lieu de ces cimetières fréquentés, on

l'écho des Pyramides redit aux ombres des Pharaons les cantiques de cet enfant de la famille de Joseph; tantôt ce pieux solitaire chante au matin les louanges du vrai soleil, au même lieu où des statues harmonieuses soupiraient le réveil de l'aurore. C'est là qu'il cherche l'Européen égaré à la poursuite de ces ruines fameuses; c'est là que, le sauvant de l'Arabe, il l'enlève dans sa tour, et prodigue à cet inconnu la nourriture qu'il se refuse à luimême. Les savants vont bien visiter les débris de l'Égypte; mais d'où vient que, comme les moines chrétiens, objet de leur mépris, ils ne vont pas s'établir dans ces mers de sable, au milieu de toutes les privations, pour donner un verre d'eau au voyageur, et l'arracher au cimeterre du Bédouin?

Dieu des chrétiens, quelles choses n'as-tu point faites! Partout où l'on tourne les yeux, on ne voit que les monuments de tes bienfaits. Dans les quatre parties du monde la religion a distribué ses milices et placé ses vedettes pour l'humanité. Le moine maronite appelle, par le claquement de deux planches suspendues à la cime d'un arbre, l'étranger que la nuit a surpris dans les précipices du Liban; ce pauvre et ignorant artiste n'a pas de plus riche moyen de se faire entendre: le moine abyssinien vous attend dans ce bois, au milieu des tigres; le missionnaire américain veille à votre conservation dans ses immenses forêts. Jeté par un naufrage sur des côtes inconnues, tout à coup vous apercevez une croix sur un rocher. Malheur à vous si ce signe de salut ne fait pas couler vos larmes ! Vous êtes en pays d'amis; ici sont des chrétiens. Vous êtes Français, il est vrai, et ils sont Espagnols, Allemands, Anglais peut-être ! Et qu'importe? n'êtes-vous pas de la grande famille de Jésus-Christ? Ces étrangers vous reconnaîtront pour frère, c'est vous qu'ils invitent par cette croix; ils ne vous ont jamais vu, et cependant ils pleurent de joie en vous voyant sauvé du désert.

Mais le voyageur des Alpes n'est qu'au milieu de sa course. La nuit approche, les neiges tombent; seul, tremblant, égaré, il fait quelques pas et se perd sans retour. C'en est fait, la nuit est venue: arrêté au bord d'un précipice, il n'ose ni avancer, ni retourner en arrière. Bientôt le froid le pénètre, ses membres s'engourdissent, un funeste sommeil cherche ses yeux; ses dernières pensées sont pour ses enfants et son épouse! Mais n'est-ce pas le son d'une cloche qui frappe son oreille à travers le murmure de la tempête,

CHAPITRE VII

CIMETIÈRES DE CAMPAGNE

Les anciens n'ont point eu de lieux de sépulture plus agréables que nos cimetières de campagne : des prairies, des champs, des eaux, des bois, une riante perspective, mariaient leurs simples images avec les tombeaux des laboureurs. On aimait à voir le gros if qui ne végétait plus que par son écorce, les pommiers du presbytère, le haut gazon, les peupliers, l'ormeau des morts, et les buis, et les petites croix de consolation et de grâce. Au milieu des paisibles monuments, le temple villageois élevait sa tour surmontée de l'emblème rustique de la vigilance. On n'entendait dans ces lieux que le chant du rouge-gorge, et le bruit des brebis qui broutaient l'herbe de la tombe de leur ancien pasteur.

Les sentiers qui traversaient l'enclos bénit aboutissaient à l'église, ou à la maison du curé : ils étaient tracés par le pauvre et le pèlerin, qui allaient prier le Dieu des miracles, ou demander le pain de l'aumône à l'homme de l'Évangile : l'indifférent ou le riche ne passait point sur ces tombeaux.

On y lisait pour toute épitaphe: Guillaume ou Paul, né en telle année, mort en telle autre. Sur quelques-uns il n'y avait pas même de nom. Le laboureur chrétien repose oublié dans la mort, comme ces végétaux utiles au milieu desquels il a vécu : la nature ne grave pas le nom des chênes sur leurs troncs abattus dans les forêts.

Cependant, en errant un jour dans un cimetière de campagne, nous aperçûmes une épitaphe latine sur une pierre qui annonçait le tombeau d'un enfant. Surpris de cette magnificence, nous nous en approchâmes, pour connaître l'érudition du curé du village; nous lûmes ces mots de l'Évangile :

« Sinite parvulos venire ad me. »

« Laissez les petits enfants venir à moi. »

Les cimetières de la Suisse sont quelquefois placés sur des rochers 1, d'où ils commandent les lacs, les précipices et les vallées. il perd la vue de Dieu, que, n'osant plus se confier à l'homme, dont rien ne garantit la foi, il se voit réduit à placer ses cendres sous la protection des animaux. 1 Voyez la note 45, à la fin du volume.

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