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Arioviste (1). Ainsi, les Séquanais n'eurent pas même l'honneur d'être vaincus par César, et l'occupation de leur territoire par les Romains fut un pas immense pour la conquête du reste de la Gaule.

C'est peut-être dans le quartier d'hiver de cette année, que Labienus (2), par les ordres de César, répara les bains de Luxeuil, comme le prouve une inscription qu'on trouva dans cette ville en 1755; inscription attaquée par le comte de Caylus, et depuis reconnue par les savans.

Les Séquanais avaient trop de puissance : ils étaient, à l'arrivée de César, les chefs de la Gaule-Celtique (3). Pour prévenir la révolte, la politique voulait qu'on les affaiblit. C'est ce que fit César, comme il nous l'apprend lui-même, et Dunod s'est trompé, quand il croit que ce coup fut porté à leur puissance, parce qu'ils avaient été les plus opposés à la domination Romaine il est visible, au contraire, qu'ils allèrent au-devant du joug qu'on leur imposa.

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Peu façonnés cependant à ce joug, ils prirent part cinq ans après au soulèvement général des Gaules sous Vercingétorix; mais les Gaulois succombèrent, et, traités en vaincus, ils furent forcés de subir le tribut que Rome leur imposa. Du reste, nos cités conservèrent leurs lois, leurs magistrats, leur administration; et il ne faut point prendre à la lettre cette assertion de Suétone, que César, depuis les Pyrénées aux Cévennes et aux Alpes, réduisit toute la Gaule

(1) Ce lieu a beaucoup embarrassé les savans. Quelques-uns le placent dans la Séquanie, et les autres en Alsace. On peut voir à cet égard Chifflet (Vesontio, part. 1re, p. 142. - La Guille, hist. d'Alsace, part. 1re, liv. Rheuanus, rerum germ., 1. 1. Schoepflin, Alsat. ill. 1, p. 107. Dom Jourdain, dans sa dissertation couronnée en 1779, fixe le théâtre de ce combat à Grange en Franche-Comté.

1.

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(2) Cette inscription porte: Luxovii therm. repar. Labienus juss. C. Jul. Caes. imp.

(3) Totius galliæ principatum obtinebant (bell. gall., liv. 6).

en province Romaine (1). Nous verrons que ce changement n'eut réellement lieu qu'en l'année 726 de Rome.

Cet heureux vainqueur affermit sa conquête en distri buant dans les divers lieux de la Gaule ses légions romaines. Nulle cité ne parut plus que la nôtre avoir besoin d'être contenue par la force, puisqu'il y envoya Labienus et un autre lieutenant, deux légions et toute sa cavalerie. C'est par ce fait que César termine ses commentaires.

Nous ajoutons que ces troupes habitèrent les montagnes, où elles avaient des camps permanens et des lieux d'observation. Tel était ce camp placé au plus haut des Vosges, que Lucain décrit dans sa Pharsale (2), et qui devait contenir les belliqueux Langrois (3). Comme notre province fut pendant quatre siècles sillonnée par les légions romaines, d'autres camps s'y formèrent plus tard pour la contenir et pour la défendre. Dans sa dissertation savante, couronnée en 1777, le père Prudent a reconnu comme tels, sur les lieux mêmes, et Végèce à la main, ceux de Dammartin-lesPesmes, de Dampierre (baillage de Baume), d'Orchamps près de Dôle, de Coldre dans le voisinage de Couliège (4), de Charcier près de Vesoul, celui de Barremon près de Baume, et peut-être celui de Morez.

Ajoutons encore que les Séquanais ne tentèrent aucune révolte, quand César allant à Pharsale, vers l'an 705 de Rome, disputer à Pompée l'empire du monde, dégarnit de troupes une partie des camps des Vosges et du Rhin.

Il fut assassiné l'an 710. Orose prétend que, la même année, Junius Brutus, le plus célèbre de ses meurtriers,

(1) Suetone in Julio Cæsare.

(2) Castraque, quæ Vogesi Curvam super ardua rupem

Pugnaces pictis cohibebant Lingones armis.

(3) Les Lingons occupaient de l'autre côté de ces montagnes une partie de la Lorraine moderne. Schopfl., Alsat. illust., t. 1, p. 6.

(4) Le comte de Caylus a donné le plan de ces deux derniers camps.

fut tué par les Séquanais (1). Mais on doit préférer à son témoignage celui d'historiens plus anciens et plus dignes de foi, Velleius (2) et Appien (3), qui placent hors des Gaules le théâtre de cet événement.

Quand César mourut, la domination des Romains était si bien établie dans nos contrées, que Marc-Antoine, son panégyriste, s'écriait :

«Jetez les yeux sur cette Gaule, qui nous envoya les Cimbres et les Teutons : aujourd'hui, réduite en servitude, elle cultive ses vastes campagnes; le Rhône, la Loire, la Saône et le Rhin sont couverts de nos bateaux, etc. »

Quel était, à l'arrivée de César dans les Gaules, l'état des Séquanais sous le rapport des mœurs et des habitudes militaires?

Ici nous n'entendons point parler de leurs mœurs comme peuple Celtique. Au sixième livre de ses commentaires, César nous fait parfaitement connaître celles des Celtes, dont les Séquanais faisaient partie. Dunod a analysé sur ce point le récit de César; mais, par une disposition bizarre, il place ce tableau abrégé à la fin de son histoire du comté de Bourgogne. Au surplus, postérieurement aux œuvres de notre historien, Pelloutier, dans un ouvrage immense, unique en son genre et admiré de tous les savans, a réuni sous un même point de vue tout ce que l'on peut recueillir sur cette partie intéressante de l'histoire celtique (4). On ne peut lui reprocher qu'une chose, c'est de ne voir partout que des Celtes. Les auteurs allemands nous font connaître aussi dans le plus grand détail les Bardes, qui étaient les poètes de cette nation (5).

(1) c. 18.

(2) L. XI, C. 5.

(3) De bell. civil., 1. 3.

(4) Pelloutier, hist. des Celtes.

(5) Macpherson, von den Barden.-Denis, Vorbereitung zu den liedern sined derBarden.

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Mais ce qu'il faut signaler, et ce que Dunod a singulièrement omis, c'est le changement opéré dans les mœurs des Séquanais, au moment où César entra dans les Gaules. Déjà ce n'était plus le peuple primitif, simple, pauvre, passionné pour la liberté et méprisant les aises de la vie. « Le voisi<< nage de la province romaine, dit César en parlant des « Celtes, et la connaissance du commerce de la mer les a << mis dans l'abondance et dans l'usage des plaisirs (1). Cette réflexion nous peint les Séquanais, peuple voisin de la province romaine, dont ils n'étaient séparés que par le Rhône (2). La Saône et son empire, objets de guerres si sanglantes avec les Eduens; le Doubs, navigable dans une partie de son cours (3); le Rhône enfin, communiquant jusqu'à la mer, étendaient au loin l'influence d'un commerce fatal à la liberté et aux habitudes guerrières. Aussi César, en arrivant à Besançon pour la première fois, y trouva des marchands; ces marchands qui, selon sa remarque profonde, apportent avec eux ce qui amollit les courages (4).

Voilà comment, ayant appelé à leur secours Arioviste et les Allemands, peuple qui avait conservé ses mœurs avanturcuses et indomptées, les Séquanais ne pouvaient plus s'en défaire. « Peu à peu accoutumés à se laisser battre, ajoute César (5), après avoir été vaincus plusieurs fois les Allemands, ils n'osent plus se comparer pour la « par « valeur à ce peuple guerrier.

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Ainsi, les mœurs des Séquanais les préparaient à la do mination romaine : ils subirent le joug de Rome, et César l'affermit dans notre province par l'abaissement calculé où

(1) Galliæ provinciæ propinquitas et transmarinarum rerum notitia multa ad copiam ususque largitur (Bell. gall., 1. 6).

(2) Cum Sequanos a provincia nostrà Rhodanus divideret (Ibid. 1. 1). (3) Strab., 1. iv. Et la légende de saint Hilaire, évêque de Besançon. (4) Quæ ad effeminandos animos important (Bell. gall., I. 1, c. 1). (5) Caes. bell. gall., 1. 6.

il tint ses habitans auparavant les dominateurs de la GauleCeltique (1).

Mais par quels ressorts, sous Auguste et ses successeurs, cette domination fut - elle si promptement et si profondément établie ?

Par la douceur du gouvernement de Rome, selon Dunod. Ce fut sans doute la raison, dit-il, pour laquelle les « Gaulois, quoique naturellement légers, impatiens et amis « de la liberté, firent si peu d'efforts à la suite, pour se « soustraire à la domination romaine. Ils ne prirent au«cune part aux guerres civiles, qui suivirent de près la conquête de leur pays; et, si l'on exempte le siége de Marseille, ils ne virent couler chez eux ni le sang de « Rome ni le leur. »

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Sans doute, ces maîtres du monde étaient doux, mais par politique, et pour les peuples qui savaient obéir. Encore, dans les temps de leur plus grande soumission, les cités gauloises furent-elles accablées d'impôts démesurés et toujours croissans.

Mais, sous cette douceur vantée par Dunod, se cachent des vues plus profondes qu'il importe de connaître, et que nous allons rechercher, en ce qui concerne plus particulièrement la Séquanie.

Dans le projet apparent de soulager le sénat et le peuple, mais avec le but réel de disposer seul des soldats et des légions, Auguste avait pris dans son lot les nations turbulentes, et par conséquent les Gaules nouvellement soumises. En 726, visitant cette partie de son gouvernement, il fit une nouvelle distribution des cités gauloises. La Celtique était trop vaste et trop puissante; il la démembra; la Séquanie, la Rauracie et l'Helvétie en furent séparées, et réunies à la Belgique : démembrement qui,

(1) Ibid.

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