Abbildungen der Seite
PDF
EPUB
[ocr errors]

tier, par le moine Jean 1, a été écrit vers l'année 1208 ou 1209, c'est une description fort élogieuse et ampoulée du pays de Touraine, dans laquelle des événements réels sont mêlés à de nombreuses erreurs. Pour le IXe siècle, l'auteur a pris les éléments de son récit dans le traité du retour de Bourgogne, qu'il indique formellement en l'attribuant à saint Odon; il s'est inspiré, comme les autres chroniqueurs, du livre de Radbode et du récit des miracles attribué à Herberne.

La Grande Chronique de Tours 2, rédigée dans les premières années du XIII° siècle par un chanoine de Saint-Martin, s'arrête à l'année 1227. C'est, avec les Gesta consulum Andegavorum, la source la plus considérable à laquelle les historiens de l'Anjou et de la Touraine ont eu recours jusqu'ici. Ce n'est cependant qu'une vaste compilation. Ainsi jusqu'à l'année 1129, pour tout ce qui est étranger à l'histoire de Touraine, l'auteur n'a fait que copier mot à mot la chronique d'Auxerre de Robert Aboland. Il n'est pas jusqu'à sa préface qu'il ne lui ait empruntée. Les auteurs consultés par Robert Aboland, et par conséquent reproduits par la grande chronique, sont pour la chronologie Hugues de Saint-Victor, pour les faits Eusèbe de Césarée et saint Jérôme, son continuateur jusqu'à l'année 378, puis Sigebert de Gemblou jusqu'en 1172. Les renseignements fournis par ces historiens ont été complėtės par des extraits de Gennadius, de Cassiodore, d'Isidore de Séville, d'Hugues de Fleuri et de Reginon. L'auteur de la grande chronique a raconté les faits relatifs à l'histoire de la Touraine d'après Sulpice Sevère et Grégoire de Tours. Pour les temps postérieurs, il a fait de nombreux emprunts au Tractatus de reversione, à l'histoire de l'abbaye de Saint-Julien et aux gestes des comtes d'Anjou. Enfin il a puisé la connaissance de quelques événements importants dans les archives de Saint-Martin. Le peu d'originalité de cette chronique n'a pas empêché Guillaume de Nangis de la copier presque en entier, à partir de l'année 1113, et elle a eu au xIIr siècle une assez grande réputation pour qu'on en ait fait un abrégé connu sous le nom de petite chronique ou chronique abrégée de Tours 3.

1. Recueil des Chroniques de Touraine, p. 291-317.

2. Ibidem, p. 64-161.

3. Ibidem, p. 162-200.

L'Histoire de Saint-Florent de Saumur est l'œuvre de plusieurs auteurs 1. Le premier en date raconte la ruine du Montglonne ou de Saint-Florent-le-Vieil par les Normands, et la translation du corps de saint Florent à Tournus, en Bourgogne. Cet auteur dit avoir puisé les principaux faits de son récit à des sources authentiques; mais il y mêle tant de circonstances merveilleuses qu'il devient difficile de distinguer la vérité au milieu des fables où il lui a plu de l'envelopper.

Il commence par rapporter la prise de Nantes par les Normands le jour de la Saint-Jean (843) 2. Peu d'années après, dit-il, arriva la destruction du Montglonne par les barbares. Ce monastère était demeuré intact depuis l'incendie allumé par Noménoé (847), mais devant cette invasion, les religieux furent obligés de fuir et de chercher un asile à l'étranger, « silenter > apud advenas exules ipsi magis et advence commorandi vesti> gant hospitium. » Jusqu'ici, l'auteur semble n'avoir reproduit que les documents authentiques conservés dans les archives du monastère, mais on ne peut admettre avec la même confiance les faits qui vont suivre. Les religieux de Saint-Florent rencontrent dans leur fuite ceux de Saint-Philibert qui, réfugiés depuis quelques années à une faible distance du Montglonne, se trouvaient aussi dans l'obligation de chercher un nouvel asile 3. Les deux troupes conviennent de faire route ensemble et de se diriger vers la Bourgogne, en associant leur bonne et leur mauvaise fortune ; ils se rendent à Tournus et déposent côte à côte, dans l'église, le corps de saint Philibert et celui de saint Florent 5.

1. Voir la nouvelle édition publiée par la Société de l'histoire de France dans ses Chroniques des abbayes d'Anjou.

2. Il ne fait que résumer les faits rapportés par le fragment historique, inscrit au cartulaire noir de Saint-Maurice d'Angers et reproduit sous l'année 813 dans la chronique de Saint-Serge.

3. Ils sont désignés dans le texte sous le nom de monachi Sancti Philiberti de Bolonnia. La Boulogne est une petite rivière qui tombe dans le lac de Grandlieu, et que Louis-le-Débonnaire permit de détourner de son cours en 819 (Dom Bouquet, VI, 516), pour la construction de la celle de Deas.

4. Historia S. Florentii Salmurensis. Recueil cité, p. 221-224.

5. L'histoire de la fuite commune des religieux de Saint-Philibert et de ceux de Saint Florent et le transport du corps de saint Florent à Tournus pourraient bien n'être qu'une fable. Il est facile de suivre l'itinéraire des religieux de Saint Philibert jusqu'à leur arrivée à Tournus (en 875 seulement). Forcés de quitter le monastère de Noirmoutier, l'antique Herio, trop exposé aux incur

Quelques années plus tard, les moines de Saint-Florent, apprenant que les barbares ont abandonné les bords de la Loire se décident à retourner chez eux avec le corps de leur patron. Ils font part de cette résolution aux religieux de Saint-Philibert, les anciens compagnons de leur fuite. Ceux-ci qui, à Tournus, se trouvaient chez eux et ne se souciaient plus de s'exposer aux dangers que pouvait leur faire éprouver un nouveau déplacement, déclarent que leur intention est de rester où ils sont, que les religieux du Montglonne sont libres de retourner sur les bords de la Loire, mais qu'ils ne peuvent songer à reprendre le corps de saint Florent, ce trésor appartenant au monastère de Tournus et ses religieux en étant responsables vis-à-vis des populations voisines, qui ont pour lui la plus grande vénération; ni les prières, ni les menaces ne purent vaincre cette

sions des Normands, les moines transportèrent le corps de leur fondateur au monastère de Deas, aujourd'hui Saint Philbert de Grandlieu, le 7 juin 836 (Historia translationis S. Filiberti abbatis, auctore Ermentario abbate). Cette nouvelle demeure fut incendiée par les Normands le 30 mars 847, et les religieux obligés de fuir en abandonnant les reliques de leur saint, ensevelies sous les ruines du monastère. Dix ans plus tard, en 857, ils revinrent chercher le corps de leur patron et le transporterent à Cunault-sur-Loire, qui leur avait été donné comme retraite en 845, par le comte Vivien (voir passim et diplóme de Charles-le-Chauve; dom Bouquet, VIII, 460). En 862, les religieux obligés de fuir de nouveau devant les hommes du Nord, partirent de Cunault le premier jour du mois de mai et se dirigérent du côté du Poitou, où ils avaient obtenu de la libéralité de Charles-le-Chauve un domaine et les villes de Marnes, de Messai, etc. (voir passim et dipl. de Charles-le-Chauve, dom Bouq. VIII, p. 524). C'est à Messai, « Messiacus, » qu'ils vinrent se réfugier, en suivant l'antique voie romaine, qui desservait le palais carlovingien de Doué et qui passait à Forges « Fabrica, près Doué, à Taizé « Taizacum, » etc. (voir passim). Là ne se borna point leur fuite. En 870, un nouveau diplôme de Charles-le-Chauve accorda à l'abbé Geilon et aux religieux de Saint-Philibert la celle de Saint-Porcien, en Auvergne, pour s'y réfugier et ne plus être obligés d'errer de côté et d'autre comme ils l'avaient fait jusque-là (dom Bouquet, VIII, 630). Enfin en 875, le même prince, sur une nouvelle demande de l'abbé Geilon, ayant égard ce que, depuis longues années, les religieux de Saint-Philibert n'avaient aucun lieu convenable pour se retirer, leur accorda la celle de SaintValérien située sur la Saone, à côté du château de Tournus où le bienheureux saint Valérien était enterré. D'après la chronique de Foulque, moine de Tournus, les religieux de Saint-Philibert avaient recueilli sur leur route d'autres reliques, entre autres celles de saint Veterin et de saint Léonard, qu'ils déposèrent à côté du corps de leur patron; mais il n'est fait aucune mention du corps de saint Florent qui, en 866, se trouvait encore à Saint-Gondon en Berri. 1. Historia S. Florentii Salmurensis, passim, p. 223-224.

[ocr errors]

obstination; c'est alors que par ruse et artifice, un clerc, natif du Mans, nommé Absalon, parvint à enlever subrepticement de Tournus le corps de saint Florent et à le ramener à Saumur.

On aperçoit dans ce récit, sinon une réminiscence formelle du traité du retour du corps de saint Martin, de Bourgogne en Touraine, du moins un thême emprunté à la même source. Dans les deux cas figurent des moines dépositaires infidèles : dans le premier, les religieux dépouillés ont recours à la force pour reprendre leur bien, à la ruse dans le second 1.

Il résulte de ce qui précède que les anciens chroniqueurs Angevins et Tourangeaux ont généralement emprunté leurs renseignements sur l'histoire du Ix° siècle aux trois ouvrages suivants :

1° Le livre de Radbode appelé: Libellus cujusdam episcopi trajectensis Radbodi nomine de quodam sancti Martini miraculo 2.

2o Le traité intitulé: Tractatus de reversione beati Martini a Burgundia 3;

3o Le récit faussement attribué à Herberne, archevêque de Tours, qui a pour titre : Miracula beati Martini post ejus reversionem sive corporis ipsius depositionem facta, edita ab Herberno, prius abbate Majoris Monasterii, post archiepiscopo Turonis civitatis ;

Le premier de ces ouvrages, le livre de Radbode, est contemporain des événements qu'il raconte, l'auteur ayant été évêque

1. La chronique de Saint-Maixent ne doit être citée ici que pour mémoire. En ce qui concerne les expéditions des Normands, cette chronique n'a fait qu'emprunter différents passages des Miracles de saint Benoit, écrits par Adrovald, moine de Fleuri (voir Mabillon, Acta ss. o. s. B., II, 387-388) et quelques faits à Guillaume de Jumièges.

La chronique de Saint-Serge d'Angers donne de précieux renseignements sur deux épisodes importants des invasions normandes; la première prise de Nantes, en 843, et le siége d'Angers par Charles-le-Chauve en 873; mais ces récits ne sont que la reproduction textuelle de deux notices, conservées dans le cartulaire noir de Saint-Maurice d'Angers, notices composées à une époque peu éloignée des faits qu'elles racontent et qui, par cela même, méritent toute confiance (voir la chronique de Saint-Serge, éditée par la Société de l'Histoire de France dans les Chroniques des abbayes d'Anjou).

2. André Salmon, Supplément aux chroniques de Touraine, p. 1-13. 3. Ibidem, p. 14-34.

4. Baluze, Miscellanea, Paris, 1715, in-8°, VII, 169.

d'Utrech de 899 à 918. C'est une espèce de sermon écrit plutôt pour exalter les mérites et la puissance du Saint que dans un but historique; l'événement qui fait le fonds de ce sermon, le siége de la cité de Tours, vainement entrepris par les Normands, doit être considéré comme vrai, il est important pour l'histoire de la Touraine.

« Les Normands, dit Radbode, qui parurent pour la première fois en France l'année de la bataille de Fontenai (842), désolaient depuis plus de soixante ans les rives de la Seine et de la Loire, portant partout le fer et la flamme, lorsqu'enfin Dieu permit que de nos jours ils apprissent à leurs dépens quelle était la puissance de saint Martin 1, ayant dans une de leurs expéditions entièrement dévasté les contrées situées entre la Seine et la Loire, ne trouvant plus de butin à faire, ils se dirigèrent en grand nombre vers la Touraine, détruisant tout sur leur passage. Après avoir brûlé les faubourgs de Tours, ils mirent le siége devant la ville. Les habitants, qui avaient pris les armes, coururent à la défense de leurs murailles, mais comparant bientôt leur petit nombre à la multitude des assiégeants, ils ne tardèrent pas à se considérer comme perdus : ils avaient encore, néanmoins, l'espoir que saint Martin ne les abandonnerait pas, et tandis que les plus résolus s'opposent aux attaques des assaillants, le reste de la population court à l'église qui renferme le tombeau du saint et fait retentir les voûtes de ses cris et de ses prières. On tire du sépulcre la chasse qui renferme les précieuses reliques et on l'amène devant la porte de la ville, qui cédait déjà sous les efforts impétueux des Normands. A la vue du corps, les Tourangeaux se sentent

1. C'est ainsi qu'il faut entendre ce passage de Radbode. Dani... subinde Galliarum provincias usque adeo depopulati sunt... hæc siquidem deprædatio supradictæ gentis effecerat, quæ ipso, ut ferunt, anno quo reges quatuor, uno geniti patre, inter se cum suis exercitibus dimicantes, Fontanidos campos multo christianorum sanguine fœdaverunt.... cum igitur jam per sexaginta aut amplius annos, memorata Danorum classis, nunc Ligeris, nunc Sequanæ, nunc utriusque fluminis navigio ripas opplesset, tandem nostris diebus quanti beatissimus Martinus apud deum meriti esset, experta est. ■ - Plus de soixante ans après la bataille de Fontenai nous portent à l'année 903 environ, qui est la véritable date du siége de Tours par les Normands. André Salmon et ses prédécesseurs, pour n'avoir pas assez remarqué le sens de ce passage, fixent arbitrairement la date du siège à l'année 813; c'est une erreur commise par la grande et la petite chronique de Tours, et qui en a engendré bien d'autres.

« ZurückWeiter »