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grâce à ce nouveau jalon, presque atteint la date, déjà reculée, des registres de la Madeleine de Châteaudun. Là, s'arrêteront nos recherches. Quiconque voudra approfondir l'histoire, désormais moins obscure, des actes de l'état-civil, recourra avec le plus grand profit aux travaux de MM. Berryat-Saint-Prix, Taillandier1 et Merlet, qui nous ont si utilement guidé dans le cours de cette notice.

Nous aurions désiré, en terminant, aborder un sujet, pour ainsi dire, parallèle à celui que nous venons de traiter. A côté des registres de paroisses, nous aurions placé les nécrologes des églises et des monastères où s'inscrivaient les obits des dignitaires et des bienfaiteurs; puis, du cloître passant dans le siècle, nous aurions ouvert ces livres d'heures, véritables archives domestiques, où le nom des vivants, comme celui des morts, s'offrait matin et soir à l'œil des fidèles, accompagné de quelque souhait de bonheur terrestre ou de paix éternelle. Nous serions enfin venu à ces livres généalogiques tenus avec soin et régularité où les actes intéressant chacun des membres de la famille étaient soigneusement consignés, et qui, en outre, contenaient souvent des renseignements d'une importance incontestable pour l'histoire locale. Mais cette étude, susceptible de développements très-considérables, eût été ainsi, nous l'avons reconnu, trop peu en rapport avec la première partie de ce travail où nous nous sommes borné à essayer de jeter quelque lumière nouvelle sur les origines des registres de l'état civil.

HAROLD DE FONTENAY.

1. Notice historique sur les anciens registres de l'état civil à Paris, Lyon, Rouen et Chartres. Annuaire histor. de la Société de l'histoire de France pour 1847, p. 200 et suiv.

2. Outre les ouvrages cités, v. encore: Des actes de l'état civil dans le pays chartrain. Chartres, Garnier, 1856.

UNE PAGE INÉDITE

DE

L'HISTOIRE DE CHARLES D'ANJOU

Lorsque Grégoire VII, déposé par le concile de Worms et par Henri IV, riposta en déposant à son tour l'Empereur, il ne fit pas seulement acte d'indépendance spirituelle: il attaqua le pouvoir temporel du premier potentat du monde. L'ingérence de l'Eglise dans les affaires féodales de l'Allemagne, était d'une audace étonnante à une époque où le clergé courbait la tête sous l'investiture laïque. Grégoire VII réussit dans son entreprise par l'effet de causes purement politiques. Les grands vassaux d'Henri IV, las de sa tyrannie et de ses vices, n'osaient se révolter; le Souverain Pontife ouvrit la porte à l'insurrection, et la victoire resta aux insurgés. Cette lutte suprême d'un pape contre un empereur a été nommée à tort la querelle des Investitures. Dès le début il n'était plus question de ce qui avait été le point de départ des hostilités; Grégoire VII aspirait non plus seulement à l'indépendance du clergé, mais à la suprématie du Saint-Siège sur toutes les puissances de la terre. Le jour où Henri IV vint s'humilier devant le fier Hildebrand, celui-ci crut être arrivé à la domination universelle; il tenait sous ses pieds l'Empereur, c'est vrai, mais un empereur sans empire. L'Eglise se méprit sur la portée de son triomphe. Néanmoins le fait fut érigé en principe, et les souverains pontifes qui succédèrent à Grégoire VII, recueillant religieusement le rêve ambitieux de ce grand homme, en regardèrent la réalisation comme nécessaire au complet exercice du pouvoir apostolique. Cette réalisation était difficile et les siècles passaient sans l'amener. Innocent IV

se crut appelé à l'insigne honneur de l'accomplir, et la papauté vit de nouveau sous ce pontife un empereur humilié et suppliant. Moins vertueux que Grégoire VII, Innocent IV ne pardonna pas à Frédéric, malgré les prières de saint Louis, malgré la surprise qu'une telle dureté de cœur offrit aux peuples étonnés, malgré l'avantage qu'il y aurait eu à s'assurer le concours impérial pour le succès de la croisade, malgré les préceptes du Christ. Ce n'était pas le triomphe de la grâce que voulait le pape, c'était le triomphe de sa politique; il le voulait éclatant et complet, et, tandis qu'il révolutionnait l'Allemagne et le nord de l'Italie, il songeait à tirer un parti utile de la suzeraineté du Saint-Siège sur le royaume de Sicile. La mort de Frédéric II lui en facilita l'occasion, et la terre napolitaine, bien que possédée par les héritiers de ce prince, fut mise en vente par le pape. Richard de Cornouailles et Charles Ier rejetèrent les offres d'Innocent; Henri III les accepta pour son fils Edmond. Dès lors la papauté se lança dans une phase d'aventures financières. Les préoccupations apostoliques eurent presque exclusivement pour objet la spéculation sicilienne, et plusieurs existences de papes s'usèrent à lui donner un corps et à en faire un marché conclu. Les événements d'Angleterre avaient empêché Henri III et Edmond de tenir leurs promesses vis-à-vis d'Innocent et d'Alexandre IV, et, bien que le jeune prince anglais eût fait confectionner le grand sceau de sa nouvelle dignité et qu'il s'y qualifiât de Roi de Sicile, la Sicile était, selon l'expression pittoresque de Richard de Cornouailles, aussi loin de lui que la lune. C'est alors qu'Urbain IV entra en négociations avec Charles d'Anjou par l'intermédiaire du notaire Albert de Parme. Battre monnaie avec le plomb des bulles, tel fut le problème financier que se posèrent, après Innocent IV, Urbain et Clément IV. Ils oublièrent, à cette recherche de l'or, la poursuite de la domination universelle, et, cantonnant leurs projets afin de s'y livrer tout entiers, ils lancèrent en deux ans, de 1263 à 1265, pour activer une affaire qui n'allait pas assez vite à leur gré, plus de soixante-dix bulles pontificales! Ils voulaient une guerre sérieuse, une guerre qui eût un résultat assuré, et, dans cette vue, ils exigeaient de Charles d'Anjou qu'il s'entourât d'une cohorte de chevaliers dont ils prenaient soin de fixer eux-mêmes le chiffre. Ils tenaient à conserver la suzeraineté du royaume et à forcer l'envahisseur de leur choix à donner des garanties et des preuves de sa vassalité vis-à-vis du Saint-Siège.

Mais ce n'était là que des moyens d'amener et d'assurer l'exécution de l'article fondamental du contrat. Urbain IV désirait annexer au patrimoine de saint Pierre le meilleur lot du royaume à conquérir; il demandait en outre une prime de 50000 marcs sterlings et un cens de 10000 onces d'or. La lecture attentive des documents me porte à croire que, si Charles d'Anjou n'eût jamais consenti à abandonner au pape les champs de bataille qu'il allait arroser du sang de ses soldats, il avait été bien près de souscrire à la rente annuelle et perpétuelle de 10000 onces d'or. Dix mille onces d'or avaient une valeur intrinsèque de plus de 625000 francs et, d'après des économistes contemporains, une valeur relative de près de 10,000,000!— Mais la Sicile était riche; elle rapportait 140,000 onces de revenus annuels à Frédéric II, et, avec l'aide du Pape, la conquête de cette proie était facile. Aussi Albert de Parme, le négociateur apostolique, allait-il réussir à maintenir intacte cette condition du contrat lorsque Charles fut nommé sénateur de Rome.

Jamais le comte d'Anjou n'avait aussi clairement compris que Rome n'appartenait pas aux papes. Que devenait alors le secours de la papauté? Quel appui Urbain IV pouvait-il prêter à la cause qu'il soulevait? Ces pensées durent agiter un prince chez qui la valeur était mûre et prudente, et il dut incontestablement différer son adhésion au contrat que lui offrait à signer le notaire apostolique, jusqu'à plus ample information sur les hommes et les faits d'Italie. Jacques Gantelme fut délégué par le nouveau sénateur au gouvernement de Rome avec le titre de vicaire. Son maître ne lui confia point le secret de ses projets ambitieux, mais il lui donna une cour de jurisconsultes et de chevaliers, une petite armée, quelque argent, une autorité presque souveraine et le mit ainsi aux prises avec les caractères et les tempéraments de la Péninsule.

J'ai dit que Rome n'appartenait pas aux papes. Cette vérité qui peut étonner, j'en conviens, bien des esprits de notre époque, doit paraître banale à tout homme versé dans l'histoire italienne du moyen-âge. Même quand ils commandaient au reste du Monde, les souverains pontifes n'étaient pas maîtres chez eux. A côté du palais de Latran, s'élevait menaçant le Capitole. Le séjour de Rome était dangereux pour la Papauté, qui, désertant sa capitale, allait, le plus souvent, errant de ville en ville et cherchant où poser sûrement sa tente. Innocent IV passa bien des années

de sa vie et les plus éclatantes dans le palais d'exil que lui avait ouvert l'archevêque de Lyon. Urbain IV a daté presque toutes ses bulles d'Orviéto, et Clément IV, de Pérouse. Aussi ne doit-on pas être étonné que le prince français ait demandé au notaire apostolique, à propos du cens à payer au Saint-Siége, que l'on fixât le lieu du payement : « Car, disait-il, je ne puis exposer mes fonds à courir par monts et par vaux à la recherche de la papauté vagabonde! » Rome donc n'était pas aux papes; elle s'appartenait et se gouvernait elle-même par un sénateur de son choix.

La nomination de Charles d'Anjou arrêta, dis-je, la marche des négociations; le sénateur se crut assez puissant pour ne plus se soumettre à toutes les exigences du Saint-Père; celui-ci considérant de son côté une élection sénatoriale à laquelle il n'avait pris aucune part comme un acte peu respectueux pour la dignité pontificale, chercha à imposer au prince une suzeraineté que les Romains n'admettaient pas. Deux formules de délimitation de pouvoir, l'une dure et l'autre adoucie, furent expédiées par la chancellerie papale au notaire négociateur, qui devait faire de la première et, à défaut, de la seconde une nouvelle condition du contrat sicilien. Mais Albert de Parme ne réussissait pas dans sa mission. Le tiers de l'année 1264 était déjà écoulé que Charles d'Anjou n'avait pas encore donné satisfaction aux instances apostoliques. Il différait, différait toujours, en attendant de Rome et d'Italie les rapports de ses envoyés sur l'état de ses affaires et de son influence dans ce pays. Guillaume Cornu, capitaine de galère, était parti de Marseille, pendant le carême, avec des lettres du comte pour Jacques Gantelme, son vicaire à Rome, et Philippe de Montfort, son ambassadeur extraordinaire auprès des républiques italiennes. Ce que le comte écrivait à Philippe de Montfort, nous l'ignorons; mais à son vicaire il demandait quel était l'état des troupes et des munitions dont il disposait et quel fondement on pouvait faire sur les Romains d'un côté, et les cardinaux et le pape de l'autre. La réponse de Gantelme ne se fit pas attendre; elle existe en original aux archives départementales des Bouches-du-Rhône, et ce précieux document, jusqu'à ce jour inconnu, est d'un intérêt extrême pour l'histoire des préliminaires de la conquête de Sicile. En voici le texte :

A très-haut et leur très-chier ségneur, à monseigneur le Conte

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