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» La ressemblance générale de ce coffre avec l'arche d'alliance » parmi les Juifs est remarquable; mais ce qui est encore plus » singulier, est qu'on lui dit qu'elle s'appelait la maison de Dieu. » Les habitants de la Nouvelle-Zélande connaissent l'in» fluence de plusieurs êtres supérieurs à l'homme, dont l'un est » suprême, les autres subordonnés. Ils ont à peu près les » mêmes dogmes que les Otahitiens, et ils écoutaient avec un » silence profond et beaucoup de respect et d'attention les di» scours sur la Divinité. »

Les usages politiques de ces peuples ne sont pas moins dignes d'attention que leurs dogmes religieux,

Chez ces différents peuples, la royauté est héréditaire du père au fils: « leur gouvernement ressemble au premier état » de toutes les nations de l'Europe, lors du gouvernement féo» dal. Le roi, le baron, le vassal, le paysan, y sont distingués : >> chaque baron fournit et conduit à la guerre un certain nomabre de combattants. »

La croyance de la Divinité se trouve donc chez tous les peuples or l'accord de tous les peuples sur l'existence d'un objet est sentiment, et non une opinion. En effet, les opinions dans l'homme sont des opérations de l'esprit, ou des volontés; or les hommes diffèrent nécessairement par les volontés, puisqu'ils ont tous nécessairement la volonté de se dominer réciproquement; mais ils s'accordent nécessairement par les sentiments, parce que le sentiment est amour de sa conservation, crainte de sa destruction, et que tous les hommes ont nécessairement le même amour pour ce qui peut les conserver, la même crainte de ce qui peut les détruire.

J'ai dit qu'on retrouvait dans toutes les sociétés le sentiment de la spiritualité et de l'immortalité de l'âme; c'est ce qui va faire l'objet du chapitre suivant.

CHAPITRE IV.

Spiritualité et Immortalité de l'âme.

Spiritualité et Immortalité de l'âme loi fondamentale des sociétés religieuses, vérité attestée par le sentiment unanime de toutes les sociétés humaines, et par l'abus qu'en ont fait les peuples idolâtres.

Les honneurs divins que les peuples, dans leur enfance, comme les peuples vieillis dans la civilisation, ont rendus à la mémoire de leurs bienfaiteurs ou de leurs chefs, ne s'adressaient pas à des cadavres inanimés; ils croyaient qu'ils existaient, puisqu'ils leur décernaient un culte et des hommages. La croyance des génies aussi ancienne que l'univers, le respect pour les morts et les sépultures, respect plus marqué à mesure que les peuples sont plus près de l'état des sociétés primitives, c'est-à-dire, à mesure qu'ils sont plus près de cet état où les peuples n'ont que des sentiments et n'ont pas encore des opinions, la coutume reçue chez un grand nombre de peuples d'ensevelir avec les morts les objets de leurs affections pour les servir dans l'autre vie, les lois sévères portées contre tous ceux qui violaient les sépultures, et qui dépouillaient les cadavres, l'obstination remarquée dans toutes les sociétés naissantes à ne pas laisser dans les combats leurs morts au pouvoir de l'ennemi; tout annonce que les peuples, à toutes les épo ques de leur existence, ont eu le sentiment consolateur que le corps n'était que la demeure d'un être qui lui était supérieur, et qui survivait à sa décomposition.

Pour connaître, sur ce dogme important, le sentiment des premiers peuples, nous n'avons pas besoin d'interroger les

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monuments anciens, ni de remonter à l'origine des sociétés. Nous avons au milieu de nous un peuple naissant; car le genre humain renaît à chaque génération vérité consolante pour les gouvernements, qui peuvent, quels que soient les progrès des fausses doctrines, recommencer un peuple par l'éducation, puisque la nature le recommence par la naissance. Or les enfants, les femmes et les conditions peu élevées, c'est-à-dire, l'âge, le sexe et les conditions qui ont des sentiments et qui ne peuvent avoir des opinions, ont naturellement le sentiment des esprits; c'est de là que vient l'opinion reçue chez presque tous les peuples, que les femmes ont la connaissance de l'avenir, et des communications particulières avec des êtres invisibles. De là la croyance de tous les peuples, que les hommes extraordinaires étaient inspirés par un génie particulier. C'est un préjugé, dit la philosophie: c'est un sentinient, répondraije, par lequel la nature supplée à la faiblesse de la raison ou au défaut de connaissances. Un enfant a peur de quelque chose qu'il ne peut voir, quoiqu'on ne l'ait jamais effrayé par des contes de revenants; il a peur dans l'obscurité, il est mal à son aise dans la solitude. Les effets de ce sentiment sont plus forts dans l'âge, le sexe, et les conditions dont la faiblesse ou les occupations ne permettent pas à l'esprit de se livrer à des études pénibles, de saisir des rapports composés: alors le sentiment supplée à toutes les autres manières de s'instruire de cette vérité fondamentale; la nature met cette vérité dans tous les cœurs, parce que tous les cœurs sont capables de sentir; mais elle ne la confie qu'à l'esprit du petit nombre, parce qu'il n'y a que le petit nombre qui ait un esprit capable de comprendre.

On peut apprécier, d'après ce principe, ce que les philosophes appelaient des préjugés populaires, et le service qu'ils rendaient à l'humanité en cherchant, comme ils le disaient, à éclairer les hommes, c'est-à-dire, à ôter les sentiments du cœur de ceux dont ils ne pouvaient suffisamment éclairer l'esprit.

Quand la raison est développée, et qu'elle peut être éclairée par l'étude et le raisonnement, alors le sentiment se règle; il cesse d'être exagéré, et la raison dit à l'homme qui veut et qui peut la cultiver, que l'homme n'est pas tout entier dans son corps, qu'il a une âme spirituelle et immortelle, et que cette vérité, et les conséquences qui en découlent, sont le lien le plus puissant des sociétés humaines. C'est la nature de la société qui établit la foi de la vérité par le sentiment; et ce sont les philosophes qui la détruisent avec leurs opinions. De là tant de systèmes absurdes sur la nature de l'âme, que les uns croyaient du feu, les autres de l'air; que ceux-là faisaient passer dans le corps des animaux, et que ceux-ci refusent même à l'homme.

On ne contestera pas sans doute que la foi de sentiment ne soit dans la plupart des hommes, et peut-être dans tous les hommes, bien plus ferme et bien plus profonde que la foi d'opinion. Qui est-ce qui croit le plus, qui est-ce qui croit le mieux aux vérités fondamentales de l'existence de Dieu et de l'immortalité de l'âme, de celui qui a écouté, souvent sans le comprendre, un discours scientifique sur cette matière, par l'orateur le plus disert, ou de la veuve, de l'enfant accablés de douleur, qui offrent leurs larmes à l'Etre suprême pour l'époux ou le père que la mort leur a ravi, qui le conjurent de le recevoir dans son sein, et qui mêlent à cet acte religieux cet espoir indéfinissable qu'ils ne sont pas séparés pour toujours des objets de leurs affections et de leurs regrets?

Une société se disant religieuse, qui se contente de parler de l'existence de Dieu et de l'immortalité de l'âme, ne peut conserver ni l'une ni l'autre de ces vérités. Elle tombe donc nécessairement dans l'athéisme et le matérialisme; et comme l'existence de Dieu et la spiritualité de l'âme immortelle sont les éléments de toutes les sociétés religieuses, il est évident qu'elle cesse aussi de se conserver elle-même.

J'appelle à l'histoire de l'état présent des sociétés religieuses en Europe, de cette proposition qui renferme tout ce qu'on

peut dire sur les sociétés religieuses, et qui, profondément méditée, présente les vérités les plus importantes en morale, et les conséquences les plus étendues en politique.

La religion ou la foi pratique de l'existence de Dieu et de l'immortalité de l'âme est amour et intelligence; mais si elle doit être amour pour tous, elle ne peut être intelligence que pour un petit nombre. Dans l'âge, le sexe et les conditions plus étrangères aux passions qui tyrannisent l'homme, l'amour est plus réglé donc elles conservent mieux l'amour de la Divinité (1); et ce sentiment peut dégénérer en superstition, c'est-àdire, en faiblesse. Au contraire, dans l'âge, le sexe et les con ditions plus livrées à l'orgueil, à l'ambition, à la cupidité, l'amour se dérègle, et l'homme substitue l'amour de soi à l'amour de Dieu mais s'il perd l'amour de Dieu, il y substitue la crainte sans amour ou la haine, car l'homme ne peut exister sans amour ou sans crainte de la Divinité et cette haine dégénère en fanatisme, qui est une force excessive. L'amour de Dieu peu éclairé peut devenir superstition. La haine de Dieu cu l'athéisme, et on l'a vu, peut devenir fanatisme. Aussi le fondateur de la religion chrétienne témoigne une prédilection particulière pour la faiblesse du sexe, de l'âge et de la condition; et il juge dangereuses, pour la vertu, l'opulence et les conditions élevées.

(1) On ne peut avoir l'amour de Dieu sans avoir l'amour de ses semblables aussi les femmes se sont particulièrement distinguées dans la révolution française par la fermeté de leur religion, et leur courageuse sensi→ bilité envers les malheureux.

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