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va toujours en se popularisant davantage; c'est-à-dire qu'une fois que le pouvoir particulier a pris la place du pouvoir général, le pouvoir va en se divisant, jusqu'à ce que chaque membre de la société exerce son pouvoir particulier. J'en appelle à l'histoire des républiques anciennes et modernes.

Une société politique constituée, une fois écartée de la constitution, ira donc en s'en éloignant davantage, jusqu'au dernier terme de la dépravation politique, qui est l'exercice de tous les pouvoirs particuliers, ou l'anarchie.

Une société religieuse, une fois écartée de la constitution, ira donc en s'en éloignant toujours davantage, jusqu'au dernier terme de la dépravation religieuse, qui est la destruction, ou plutôt l'oubli du pouvoir général, par le débordement de toutes les opinions, ou l'athéisme.

La France, dans sa déconstitution politique et religieuse, a donc atteint le dernier terme de la dépravation ou de la déconstitution politique et religieuse.

Mais la société est dans la nature de l'homme, et la constitution dans la nature de la société.

Donc une société religieuse ou politique, parvenue au dernier terme de sa déconstitution, tendra à se reconstituer : comme la pierre qu'une force étrangère a lancée dans les airs, et éloignée de sa tendance naturelle au centre de la terre, tend à y revenir, lorsque la force qui l'en éloignait est épuisée, et qu'elle est au plus haut point de son éloignement du centre.

Et les hommes ne peuvent empêcher la marche éternelle et nécessaire des choses; « car si le législateur politique et reli» gieux, se trompant dans son objet, établit un principe diffe>> rent de celui qui naît de la nature des choses, la société ne » cessera d'être agitée jusqu'à ce que le principe soit détruit ou » changé, et que l'invincible nature ait repris son empire. »

Donc les républiques tendent à revenir à la constitution politique ou à la monarchie, et les sectes à revenir à la constitution religieuse ou au catholicisme; et elles sont, les unes et les autres, d'autant plus près de revenir à leur constitution natu

relle, qu'elles sont les unes plus voisines de l'anarchie, les autres plus près de l'athéisme.

Déjà des événements récents et publics ont prouvé la vérité du principe à l'égard des deux plus puissantes républiques de l'Europe, et par conséquent établi sa vraisemblance à l'égard des sectes.

La république de Hollande, victime de sa propre anarchie et jouet de l'anarchie de la France, ne sortira de la tyrannie révolutionnaire à laquelle elle est assujettie, que pour passer sous un gouvernement monarchique ou qui tendra fortement et prochainement à le devenir; et la république de Pologne, dévorée par une anarchie invétérée, a passé, au moins pour un temps, sous la domination monarchique de trois puissances: fait digne de la plus sérieuse considération, que la philosophie, en voulant établir de nouvelles républiques, a hâté la chute de celles qui existaient déjà; preuve de la vanité des projets des hommes, instruments aveugles des volontés irrésistibles qui émanent de la nature des êtres, et qui ne sont elles-mêmes que la volonté éternelle et immuable de l'être qui les a produits.

CONCLUSION

DE LA THÉORIE DU POUVOIR RELIGIEUX.

J'ai traité dans cet ouvrage les questions les plus délicates de la politique et de la religion; et s'il est difficile que je n'aie pas aperçu quelque vérité intéressante, il est possible que je sois tombé dans quelque erreur involontaire.

Animé du seul motif de chercher la vérité, du seul désir de la répandre, je n'ai point porté dans la recherche de la vérité

les préventions d'un homme de parti, ni dans sa publication l'orgueil d'un réformateur. Je reconnais en politique une autorité incontestable, qui est celle de l'histoire, et dans les matières religieuses, une autorité infaillible, qui est celle de l'Eglise; et je soumets à l'autorité de l'Eglise la partie de mon ouvrage qui traite de la religion, comme j'en soumets la partie politique à l'autorité des faits; et ma soumission à l'Eglise est entière, parce qu'elle n'est pas aveugle.

Ce n'est qu'avec une extrême défiance de moi-même que je publie cette seconde partie de mon ouvrage. J'ai voulu consulter l'autorité la plus respectable qu'il puisse y avoir dans l'Eglise, des lettres écrites dans ce dessein ne sont pas parvenues; il n'existait aucun corps en France, ou pour mieux dire, aucun corps de Français dont la décision pût être pour moi un garant de l'opinion générale, et me répondre que je ne m'étais pas écarté des vrais principes: et il m'a paru que l'opinion générale, ou la société, pouvait seule être juge compétent du nouveau rapport sous lequel je considère l'ordre social. Mes erreurs, après tout, ne sauraient être dangereuses : ce ne sont pas celles que l'ignorance propage, mais celles que l'orgueil défend, qui font le malheur des sociétés.

Les uns trouveront peut-être que je mets trop de politique dans la religion, et les autres, trop de religion dans la politique: je répondrai aux premiers par ces paroles du divin fondateur de la religion chrétienne : « Toute puissance m'a été donnée dans le ciel et sur la terre; » et dans celles que nous lui adressons nous-mêmes : « Que votre volonté soit faite » sur la terre comme dans les cieux. » Je répondrai aux seconds par ces paroles du coryphée de la philosophie: «Jamais »Etat ne fut fondé, que la religion ne lui servit de base. »>

J'ai voulu prouver qu'en supposant l'existence des êtres sociaux, Dieu et l'homme intelligent physique, tel qu'il a été et tel qu'il est, le gouvernement monarchique royal, et la religion chrétienne catholique, étaient nécessaires; c'est-à-dire tels qu'ils ne pourraient étre autres qu'ils ne sont, sans choquer la

nature des êtres sociaux, c'est-à-dire la nature de Dieu et celle de l'homme en société.

Or l'existence de l'homme n'est pas un problème; et pour connaître ce qu'il est dans la société, ce ne sont pas les systèmes des philosophes qu'il faut consulter, mais le témoignage de l'histoire et celui de nos sens, c'est-à-dire qu'il faut juger l'homme de la société par ses œuvres publiques et sociales.

Quant à l'existence de Dieu, elle se prouve à l'homme physique par les œuvres extérieures de Dieu, je veux dire par la création; elle se prouve à l'homme intelligent par le raisonnement, dont cette partie de mon ouvrage a été le développement, et que je réduis ici à sa plus simple expression, pour la satisfaction de celui qui voudra le méditer, et même pour la commodité de celui qui voudra le combattre.

Les hommes pensent à Dieu: donc Dieu peut être, car les hommes ne peuvent penser qu'à ce qui peut être.

Les hommes ont le sentiment de Dieu donc Dieu est car les hommes ne peuvent avoir le sentiment que de ce qui est.

Les hommes pensent à Dieu, puisqu'ils ne peuvent même nier son existence, sans penser à lui.

Les hommes ont le sentiment de Dieu; car le sentiment dans l'homme est amour ou crainte; l'amour ou la crainte se manifestent nécessairement dans l'homme par un acte extérieur et matériel, ou par l'action de ses sens; et comme l'amour est principe de production et de conservation, la crainte principe de destruction, l'amour se manifestera par un acte qui produit ou qui conserve, et la crainte par un acte qui détruit.

Cet acte extérieur et matériel du sentiment, cet acte de l'amour et cet acte de la crainte, cet acte qui produit ou qui conserve, et cet acte qui détruit, je les retrouve, sous le nom de sacrifice, dans les deux sociétés religieuses qui comprennent tous les hommes, tous les temps et tous les lieux, dans la société religieuse de l'unité de Dieu, ou le monothéisme, et dans la société religieuse de la pluralité des dieux ou le po

lythéisme. Je retrouve ce sacrifice non-seulement dans les deux sociétés religieuses, mais dans tous les âges et tous les états de ces deux sociétés religieuses; et je conclus que la société humaine ne peut pas plus exister sans l'un ou sans l'autre de ces sacrifices, qu'elle ne peut exister sans l'une ou sans l'autre de ces religions. Et en effet, je vois en France, l'idolâtrie remplaçant le christianisme; je vois le sacrifice du polythéisme, la prostitution et le meurtre, remplaçant le sacrifice du monothéisme, ou le don pur et sans tache de l'homme et de la propriété.

Je conclus donc qu'il y a eu dans toutes les sociétés humaines le sentiment de Dieu; puisque je vois, dans toutes les sociétés humaines, l'acte extérieur matériel de ce sentiment: or les hommes ne peuvent avoir le sentiment que de ce qui est : Donc Dieu est. Si Dieu est, si l'homme existe, il y a société entre eux; car entre deux êtres semblables et coexistants il ya nécessairement un rapport: la société est la réunion d'êtres semblables: donc il y aura réunion entre Dieu et les hommes, donc il y aura parole de Dieu aux hommes, puisque la parole est le seul moyen de réunion, qui nous soit connu, avec des intelligences unies à des corps; donc il y aura écriture, qui n'est que la parole fixée, transmissible à tous les temps, et transportable dans tous les lieux, parce que les intelligences vivent dans tous les temps et dans tous les lieux.

La société est la réunion d'êtres semblables, réunion dont la fin est leur conservation mutuelle. Donc il y aura, dans la société, un pouvoir conservateur qui agira par une force conservatrice; et comme la société est un être général ou extérieur, le pouvoir sera extérieur et la force sera extérieure. Le pouvoir qui est Dieu même sera extérieur, comme la force ou les ministres de son culte sont extérieurs. Ici je soumets une réflexion importante à ceux qui croient à l'existence d'un Etre suprême, justice, bonté et sainteté.

On conçoit pourquoi Dieu a laissé marcher dans leurs voies les nations idolâtres; pourquoi il a permis que la connaissance

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