la mer, dans le golfe d'entre la Normandie et la Bretagne. Cette apparition eut lieu l'an 706, et la fête en a toujours été célébrée, depuis, le 16 octobre. (1)

HENRI DE GENOUDE.

On demandait un jour aux trois enfants de M. de Genoude, Henri, René et Gui: Qui a créé les anges? La réponse était aisée : C'est Dieu. Mais qui a créé le diable? là était la difficulté. René ne veut pas que ce soit encore Dieu; le petit Gui, qui ne manque pas de malice, ne sait trop si ce n'est point de lui que l'on veut parler; Henri réfléchit, et il s'écrie, comme un inspiré : « C'est Dieu qui l'a fait ange, et c'est lui qui s'est fait diable ! »

LEÇON VIII.

DE L'HOMME ET DE SA LIBerté.

Nous diviserons cette leçon en quatre paragraphes. Nous parlerons, dans le premier, de la nature de l'homme; dans le second, de la spiritualité et de la liberté de l'âme humaine; dans le troisième, du premier homme et de la première fem me; dans le quatrième, de la physionomie et de la phrénologie.

PARAGRAPHE PREMIER.

DE LA NATURE DE L'HOMME.

= D. Q'uest-ce que l'homme? - R. L'homme est une créature intelligente composée d'un corps et d'une âme.

EXPLICATION. L'homme, du mot latin humus, qui veut dire terre (2), est une créature intelligente, c'est-à-dire une créature qui pense, qui connaît, qui comprend, qui raisonne. L'homme n'est point, comme l'ange, un pur esprit; deux substances essentiellement distinctes constituent sa nature; ou, en d'autres termes, deux principes existent en lui: l'esprit et la matière, (1) Dict. de la Bible, par D. Calmet, art. Michel. (2) Dict. philologique de Huré.

une âme et un corps. C'est une intelligence unie à des organes et servie par eux, selon la belle définition qu'a donnée de l'homme un illustre écrivain, de Bonald. L'âme et le corps ne forment qu'une seule personne, (1) un homme, lequel, selon l'énergique expression de l'apôtre saint Pierre, est appelé tout entier à la participation de la nature divine. (2) Nous expliquerons plus tard ces paroles. - D. Comment Dieu créa-t-il le premier homme? R. Dieu forma de terre le corps du premier homme, et lui donna, pour l'animer, une âme qu'il tira du néant.

EXPLICATION. - Lorsque Dieu voulut former la lumière ou la mettre en action (3), il dit : « Que la lumière « soit, et la lumière fut. » (4) Lorsqu'il voulut former les différentes espèces d'animaux qui habitent la terre, il dit : « Que la terre produise des animaux vivants de < toutes les espèces, et cela se fit ainsi. » (5) Mais lorsqu'il voulut créer l'homme, il n'employa point cette parole impérieuse et dominante. Je le vois délibérer avec lui-même et consulter sa divine sagesse : « Faisons, dit«il, l'homme à notre image et à notre ressemblance. » (6) Je le vois prendre de la terre pour former le corps de sa nouvelle créature, et cette terre, arrangée sous une telle

(1) Anima rationalis et caro unus est homo. (Symb. S. Athan.) (2) Divinæ consortes naturæ. (II, Petr., 1, 4.)

(3) Voir ce que nous avons dit de la lumière dans la leçon iv. (4) Fiat lux, et facta est lux. (Gen., 1, 3.)

(5) Dixit quoque Deus : Producat terra animam viventem in genere suo, jumenta, et reptilia, et bestias terræ secundum species suas. Factumque est ita. (Gen., 1, 24.)

(6) Faciamus hominem ad imaginem et similitudinem nostram. (Gen., 1, 26.) — Selon quelques savants commentateurs de l'Écriture sainte, le terme hébreu que l'on a traduit par imago, image, ne s'entend que des substances purement spirituelles; et le terme hébreu que l'on a traduit par similitudo, ressemblance, ne s'applique qu'à des substances matérielles; c'est comme si le Dieu créateur avait dit : Faisons l'homme semblable à nous, quant à sa substance spirituelle, et quant à sa substance matérielle, donnons-lui la forme sensible que doit prendre un jour celle des personnes divines qui s'incarnera.

main, reçoit la plus belle figure qui ait encore paru dans le monde. Puis il répand sur le visage de l'homme un souffle de vie, et l'homme devient vivant et animé. (1) Ce souffle de Dieu n'est point une émanation, une portion de Dieu, dont la nature simple exclut toute division; c'est une substance spirituelle, intelligente et libre, un esprit, une âme que Dieu tire du néant, qu'il crée à son image et à sa ressemblance; c'est-à-dire une âme qui a, comme Dieu, mais dans un degré fini, le pouvoir de connaître, d'aimer et de se déterminer librement. << Faisons « l'homme à notre image et à notre ressemblance. »> Vous le savez, mes enfants, quand un ouvrier, un artiste veut faire quelque chose de très-bien, un chef-d'œuvre, il réfléchit, il médite, il consulte. Voilà pourquoi Dieu, avant de créer l'homme, prend conseil en lui-même, afin de nous faire voir que ce qu'il entreprend surpasse tout ce qu'il a exécuté jusqu'alors; afin de nous faire connaître notre excellence au-dessus de ses ouvrages, et de nous convaincre que nous sommes, de toutes ses créatures visibles, la plus noble et la plus favorisée.

D. Qu'est-ce que l'âme de l'homme?

R. C'est une partie de nous-même que nous ne pouvons ni voir ni toucher, et qui néanmoins nous fait sentir, penser, vouloir et agir.

EXPLICATION. L'homme sent, il pense, il veut. L'homme sent c'est-à-dire qu'il éprouve, ou du moins qu'il est susceptible d'éprouver certaines modifications, certaines impressions sensibles, comme le plaisir et la douleur, l'amour et la haine, l'espérance et la crainte, la joie et la tristesse. Il pense: (2) c'est-à-dire qu'il a la faculté de concevoir les choses, de s'en faire une idée, de les distinguer les unes d'avec les autres. Il veut :

(1) Inspiravit in faciem ejus spiraculum vitæ, et factus est homo in animam viventem. ( Gen., II, 7.)

(2) Le mot pensée comprend, dans son acception générale, toutes les opérations de l'esprit.

c'est-à-dire qu'il a la faculté de choisir entre deux ou plusieurs objets, de se déterminer pour celui-ci de préférence à celui-là. Mais à laquelle des deux substances qui constituent notre être, appartiennent ces diverses facultés? Ce n'est point au corps, il n'en est nullement susceptible, comme nous le prouverons bientôt, mais à l'âme. Oui, mes enfants, c'est notre âme qui nous fait sentir, penser et vouloir; ou plutôt, en nous, ce qui sent, pense et veut, c'est notre âme seule. (1) C'est elle aussi qui nous fait agir: elle commande à nos yeux, et aussitôt ils se fixent dans la direction qu'elle veut; à notre bouche et à notre langue, et aussitôt notre langue et notre bouche se mettent en mouvement, et de ce mouvement résulte un son articulé qu'on appelle parole; à nos membres, et aussitôt ils obéissent et nous transportent d'un lieu à un autre.

D. Qu'est-ce que le corps de l'homme?

R. C'est cette partie de nous-même qui tombe sous les sens, et qui est composée de différents membres, comme la tête, les mains, les pieds, etc.

EXPLICATION. Le corps même de l'homme, quoiqu'il ait été formé de boue et qu'il ne soit qu'un peu de matière organisée, nous montre sa dignité et sa supériorité sur tous les autres animaux. Tandis que ceux-ci, guidés par un instinct héréditaire, courbés vers la terre, que seule ils connaissent, cherchent de l'œil à sa surface les objets qui conviennent à leurs appétits et aux besoins de leur conservation, voyez le front de l'homme élevé vers le ciel, qui doit être un jour sa demeure! Mais c'est surtout par son âme, douée de la faculté de penser, que l'homme est infiniment supérieur à tous les autres ouvrages visibles du Créateur. C'est ce qui fait dire à Pascal: « Quand l'univers l'écraserait, l'homme serait

(1) « Qu'est-ce qui sent du plaisir en nous? est-ce la main ? est-ce le bras? est-ce la chair? est-ce le sang? On verra qu'il faut que ce soit quelque chose d'immatériel. » (Pensées de Pascal, édit. de Migne, p. 656.)

encore plus noble que ce qui le tue, parce qu'il sait qu'il meurt; et l'avantage que l'univers a sur lui, l'univers n'en sait rien. Ainsi, toute notre dignité consiste dans la pensée. » (1)

D. Il y a donc deux choses dans l'homme? R. Oui, il y a deux choses dans l'homme, un corps et une âme.

EXPLICATION. Deux substances essentiellement distinctes constituent, ainsi que nous venons de l'expliquer, la nature de l'homme : un corps formé primitivement du limon de la terre (2), et qui doit un jour tomber en dissolution et en poussière, et une âme créée à l'image et à la ressemblance de Dieu, c'est-à-dire une âme immortelle, douée d'entendement, de volonté et de liberté, et capable de vivre, comme Dieu, de connaissance et d'amour. Mais pourquoi une âme si noble dans un corps de boue? « Afin que l'homme ne s'enorgueillisse pas, et que l'infirmité du corps, rehaussée par la gloire de l'âme, et la gloire de l'âme humiliée par la bassesse du corps, le tiennent comme dans un juste équilibre, sans qu'il s'élève ou s'avilisse trop. » (3)

D. Chaque homme a-t-il une âme qui lui soit propre? R. Oui, et l'opinion contraire a été formellement condamnée par l'Eglise. EXPLICATION. Selon quelques philosophes, il n'y a point dans chaque homme une âme qui lui soit propre; mais il existe une âme universelle, laquelle est commune à tous. Cette erreur, qui détruit le moi humain et ôte à chacun la responsabilité de ses actes, a été solennellement condamnée par le pape Léon X, dans une bulle en date du 14 des calendes de janvier 1514, où il promulgue différentes décisions du concile de Latran: « Nous condamnons et réprouvons tous ceux qui assurent que l'âme humaine est mortelle, ou qu'il n'y en a qu'une en tous les hommes,

(1) Pensées de Pascal, édit. de Migne, p. 657.

(2) Formavit... hominem de limo terræ. (Gen,, 11, 7.) (3) La Chétardie, t. 1, p. 61.