Abbildungen der Seite
PDF
EPUB

par vous-mêmes, vous ne réussirez qu'à produire des imitations, qui jusque dans leur impuissance attesteront le dogme dont vous avez peur, et illumineront la gloire que vous voulez détruire. Qu'a fait Luther, sinon confirmer l'Eglise ? Qu'a fait Mahomet, sinon grandir Jésus-Christ? Qu'ont fait tous les usurpateurs du titre prophétique, sinon maintenir dans les ténèbres le souvenir et la nécessité de la révélation ? Et que faites-vous en niant la révélation, sinon prouver par votre exemple que la religion s'éteint dans tout esprit qui nie la réalité d'un ordre surnaturel ?

Messieurs, le monde est à une heure remarquable de sa destinée. Depuis un siècle, il a essayé de fonder toutes les choses humaines sur la nature et la raison; il s'est cru capable de régner par lui-même, sans l'intervention d'aucune idée mystérieuse, d'aucune puissance indéfinie. Vous avez sous les yeux le résultat de cette grande tentative. La discipline sociale s'est brisée dans vos mains; les ressorts ingénieux où vous comptiez l'assujétir, se sont trouvés trop faibles contre les résistances et les agressions. Ce qu'il y avait de généreux dans vos plans de réforme n'a pas eu plus de bonheur que ce qui s'y rencontrait de chimérique, et la justice s'est étonnée de ne pouvoir donner à vos œuvres ni la durée, ni la majesté. Attendrez-vous longtemps encore pour douter de vous-mêmes? Ne soupçonnerez-vous pas que quelque chose vous manque, et douloureusement avertis par la providence innée des choses, ne lèverez-vous jamais les yeux vers le

T. III.

19

pôle éternel où vous avez laissé la science du passé et celle de l'avenir? Il en est temps; appelons Dieu à notre secours; reconnaissons que nous avons avec lui des rapports plus profonds que ceux de la nature, et qu'y renoncer par faiblesse ou par orgueil, c'est ravir au genre humain, avec ses plus grands devoirs, ses plus hautes vertus et ses plus nécessaires facultés.

CINQUANTE-QUATRIÈME CONFÉRENCE.

DE DEUX OBJECTIONS CONTRE LE COMMERCE SURNATUREL

DE L'HOMME AVEC DIEU.

MONSEIGNEUR,

MESSIEURS,

Après avoir établi que le commerce de l'homme avec Dieu ne repose pas sur la nature et la raison, mais sur un ordre plus élevé auquel la doctrine catholique donne le nom de surnaturel, la suite des idées nous conduirait à rechercher pourquoi il en est ainsi, et quels sont les motifs qui ont déterminé Dieu à ne pas comprendre dans nos facultés sensibles et intelli

gibles tous les moyens dont nous avions besoin pour entrer en rapport avec lui. Mais le rationalisme ne nous permet pas une marche aussi rapide. La question de l'ordre surnaturel est trop grave, pour qu'il se rende à la démonstration que nous en avons donnée sans essayer au moins de l'affaiblir. Ecoutons-le donc.

Il est vrai, nous dit-il, qu'à s'en tenir à la surface des choses, la prophétie et le sacrement ont un caractère d'universalité et de perpétuité, par où ils semblent marcher d'un pas égal avec la nature et la raison; mais ce n'est là qu'une apparence qui se dissipe au premier regard sérieux que l'on jette sur cet illogique établissement. En effet, pour qu'il y ait une véritable universalité, une véritable perpétuité, il faut que la chose ou la pensée qui aspire à ces grands caractères soit la même partout et toujours; sans l'unité, l'universalité et la perpétuité sont impossibles, puisque l'universalité n'est que l'expansion de l'unité dans l'espace, et la perpétuité son expansion dans le temps. Ainsi la nature est vraiment universelle et perpétuelle, parce que ses lois, en quelque lieu ou en quelque siècle qu'on les consulte, rendent à quiconque les interroge une réponse qui ne change jamais. Au pôle comme à l'équateur, sous l'instrument de Newton comme sous les yeux d'Aristote, la lumière physique tombe et rejaillit d'un objet en formant un angle constant. Il en est de même de la raison. Faculté d'un être libre, elle ne suit pas les caprices de la volonté; elle l'approuve ou la condamne selon des rè

gles qui ne fléchissent point. Parlez à l'Athénien de Périclès, à l'Arabe du désert, au sauvage des forêts ignorées, à l'enfant de la barbarie ou à l'homme fait de la civilisation : tous vous entendent, et alors même qu'ils disputeraient entre eux de leurs opinions, ils invoquent pour les soutenir des principes uniformes, aussi clairs et certains à l'intelligence de l'ignorant qu'à celle du docteur. En est-il ainsi de l'ordre surnaturel? ou plutôt rien est-il comparable au chaos des superstitions qui en composent le spectacle? Ouvrez ce Panthéon qu'y voyez-vous? des dieux qui s'insultent, des dogmes qui se contredisent, des cultes qui se renient, des sacerdoces qui s'anathématisent, des autels qui se jettent du sang, une discorde infinie comme l'objet sacré où prétendent atteindre ces épouvantables controverses de l'impuissance et de l'orgueil. Voilà le fait surnaturel! Le voilà tel qu'il est dans l'histoire et devant nos yeux! Et c'est là ce qu'on appelle une chose divine, une institution non pas seulement égale à la nature et à la raison, mais qui, supérieure à tout ce qui est créé, doit servir de norme à la conscience, de lumière à l'esprit, de couronne à l'univers! Pour nous, quelle que soit la cause de ce terrible phénomène, nous l'accusons d'être humain ; il est humain parce qu'il n'est pas un.

Si vous répondez que parmi tous ces cultes il en est un seul qui est le vrai, dont les autres ne sont qu'une impie ou malheureuse contrefaçon, la difficulté perdra peut-être de sa force par un côté, mais en la

« ZurückWeiter »