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Des devoirs du législateur; il ne doit pas se borner à connaître le meilleur gouvernement possible; il doit savoir aussi, dans la pratique, améliorer les éléments actuels dont il peut disposer; de là, pour lui, la nécessité de connaître les diverses espèces de constitutions, et les lois spéciales qui sont essentielles à chacune d'elles.

§ 1. Dans tous les arts, dans toutes les sciences qui ne restent point trop partielles, mais qui arrivent à embrasser complétement un ordre entier de faits, chacune doit pour sa part étudier sans exception tout ce qui se rapporte à son objet spécial. Prenons, par exemple, la science des exercices corporels. Quelle est l'utilité de ces exercices? Comment doivent-ils se modifier suivant les tempéraments divers? L'exercice le plus salutaire n'est-il pas nécessairement celui qui convient le mieux aux natures les plus vigoureuses et les plus belles? Quels exercices sont exécutables pour le plus grand nombre des élèves? En est-il un qui puisse également convenir à tous? Telles sont les questions que se pose la gymnastique. De plus, quand bien même

aucun des élèves du gymnase ne prétendrait acquérir ni la vigueur, ni l'adresse d'un athlète de profession, le pédotribe et le gymnaste n'en sont pas moins capables de lui procurer au besoin un pareil développement de forces. Une remarque analogue serait non moins juste pour la médecine, pour la construction navale, pour la fabrication des vêtements, et pour tous les autres arts en général.

§ 2. C'est donc évidemment à une même science de rechercher quelle est la meilleure forme de gouvernement, quelle est la nature de ce gouvernement, et à quelles conditions il serait aussi parfait qu'on peut le désirer, indépendamment de tout obstacle extérieur; et d'autre part, de savoir quelle constitution il convient d'adopter selon les peuples divers, dont la majeure partie ne saurait probablement recevoir une constitution parfaite. Ainsi, quel est en soi et absolument le meilleur gouvernement, et quel est aussi le meilleur ¡ relativement aux éléments qui sont à constituer: voilà ce que doivent savoir le législateur et le véritable homme d'État. On peut ajouter qu'ils doivent encore être capables de juger une constitution qui leur serait hypothétiquement soumise, et d'assigner, d'après les données qui leur seraient fournies, les principes qui la feraient vivre dès l'origine, et lui assureraient, une fois qu'elle serait établie, la plus longue durée possible. Or je suppose ici, comme on voit, un gouvernement qui n'aurait point reçu une organisation parfaite, sans

§ 1. Le pédotribe. Voir plus haut, homme d'État. Il faut remarquer livre V, ch. IV, § 5. la profondeur toute pratique § 2. Le législateur et le véritable ces conseils.

être dénué d'ailleurs des éléments indispensables, mais qui n'aurait pas tiré tout le parti possible de ses ressources, et qui aurait encore beaucoup à faire,

§ 3. Du reste, si le premier devoir de l'homme d'État est de connaître la constitution qui doit généralement passer pour la meilleure que la plupart des cités puissent recevoir, il faut avouer que le plus souvent les écrivains politiques, tout en faisant preuve d'un grand talent, se sont trompés sur les points capitaux. Il ne suffit pas d'imaginer un gouvernement parfait; il faut surtout un gouvernement praticable, d'une application facile et commune à tous les États. Loin de là, on ne nous présente aujourd'hui que des constitutions inexécutables, et excessivement compliquées; ou, si l'on s'arrête à des idées plus pratiques, c'est pour louer Lacédémone, ou un État quelconque, aux dépens de tous les autres États qui existent de nos jours. § 4. Mais quand on propose une constitution, il faut qu'elle puisse être acceptée et mise aisément à exécution, en partant de la situation des États actuels. En politique, du reste, il n'est pas moins difficile de réformer un gouvernement que de le créer, de même qu'il est plus malaisé de désapprendre que d'apprendre pour la première fois. Ainsi, l'homme d'État, outre les qualités que je viens d'indiquer, doit être capable, je le répète, d'améliorer l'organisation d'un gouvernement déjà constitué; et cette tâche lui serait complétement impossible, s'il ne connaissait pas toutes les formes diverses de gouvernement. C'est en effet une erreur grave de croire, comme on le fait communé

§ 3. Des constitutions inexécutables. Aristote veut désigner Pla

pour

ment, qu'il n'y a qu'une seule espèce de démocratie, qu'une seule espèce d'oligarchie. § 5. A cette indispensable connaissance du nombre et des combinaisons possibles des diverses formes politiques, il faut joindre une égale étude, et des lois qui sont en elles-mêmes les plus parfaites, et de celles qui sont le mieux en rapport avec chaque constitution; car les lois doivent être faites pour les constitutions, tous les législateurs reconnaissent bien ce principe, et non les constitutions les lois. La constitution dans l'État, c'est l'organisation des magistratures, la répartition des pouvoirs, l'attribution de la souveraineté, en un mot, la détermination du but spécial de chaque association politique. Les lois au contraire, distinctes des principes essentiels et caractéristiques de la constitution, sont la règle du magistrat dans l'exercice du pouvoir, et dans la répression des délits qui portent atteinte à ces lois. § 6. Il est donc absolument nécessaire de connaître le nombre et les différences de chacune des constitutions, ne fût-ce même que pour pouvoir porter des lois; en effet, les mêmes lois ne sauraient convenir à toutes les oligarchies, à toutes les démocraties, la démocratie et l'oligarchie ayant chacune plus d'une espèce et n'étant pas uniques.

ton, sans doute, et peut-être aussi Xénophon, dans les lignes suivantes.

§ 5. Les lois, au contraire. Aristote distingue ici fort nettement la constitution et les lois particulières, qui en découlent. Montesquicu, inspiré par le philosophe grec, bien que peut-être à son propre insu, a traité fort longue

ment ce très-grave sujet. Rousseau n'en a pas dit un mot, parce qu'il n'a pensé qu'à une seule espèce de constitution, et qu'exagérant encore les idées des anciens, il n'a cherché que le gouvernement modèle, sans s'occuper des faits, c'est-à-dire des diverses constitutions possibles et réelles. Il a trop négligé l'histoire.

CHAPITRE II.

Résumé des recherches qui précèdent; indication de celles qui vont suivre. Subordination des mauvais gouvernements entre eux; des nuances diverses de la démocratie et de l'oligarchie; la théorie des révolutions devra terminer cet ouvrage politique.

§ 1. Dans notre première étude sur les constitutions, nous avons reconnu trois espèces de constitutions pures: la royauté, l'aristocratie, la république ; et trois autres espèces, déviations des premières la tyrannie pour la royauté, l'oligarchie pour l'aristocratie, la démagogie pour la république. Nous avons parlé déjà de l'aristocratie et de la royauté; car traiter du gouvernement parfait, c'était traiter en même temps de ces deux formes, qui s'appuient toutes deux sur les principes de la plus complète vertu. Nous avons en outre expliqué les différences de l'aristocratie et de la royauté

§ 1. Dans notre première étude. Voir plus haut, liv. III, ch. v. L'aristocratie. Voici un des passages les plus formels qu'on puisse alléguer contre l'ordre actuel des livres de la Politique. Il a été parlé tout au long, dans le IIIe livre, de la royauté; mais en suivant l'ancien ordre, il n'a pas encore été dit un seul mot de l'aristocratie. Or, Aristote déclare qu'en traitant de la parfaite république, du gouvernement modèle, il a entendu traiter de l'aristocra

tie. Donc les anciens VIIe et VIIIe livres, où il expose le système du gouvernement modèle, viennent avant le IVe. M. Goettling n'a pas pensé à discuter ce passage. Voir l'appendice, la fin du IIIe livre et le commencement du IVe (7e). Du reste, je prie le lecteur qui voudra s'assurer de la légitimité du nouvel ordre des livres, de donner la plus grande attention à ce passage, et de le rapprocher du résumé si formel qu'Aristote fait dans ce chapitre même de la com

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