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mais ils naiffoient fous le joug; ils avoient l'habitude de le porter quand ils en fentoient la pefanteur, & ils fe contentoient d'attendre l'occafion de le fecouer. Enfin, déjà accoutumés à mille commodités qui les forçoient à fe tenir raffemblés, la difperfion n'étoit plus fi facile que dans les premiers temps, où nul n'ayant befoin que de foi-même, chacun prenoit fon parti, fans attendre le confentement d'un autre.

contoit

Page 147.

que,

(14) Le. Maréchal de V*** dans une de fes campagnes, les exceffives fripponneries d'un Entrepreneur des vivres ayant fait fouffrir & murmurer l'armée, il le tança vertement, & le menaça de le faire pendre. Cette menace ne me regarde pas, lui répondit hardiment le frippon, & je fuis bien aife de vous dire qu'on

ne

ne pend point un homme qui difpofe de cent mille écus. Je ne fais comment cela fe fit, ajoutoit naïvement le Maréchal, mais en effet il ne fut point pendu quoiqu'il eût cent fois mérité de l'être.

Page 181.

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(15) La juftice diftributive s'oppoferoit même à cette égalité rigoureufe de l'état de nature quand elle feroit praticable dans la fociété civile; & comme tous les membres de l'Etat lui doivent des fervices proportionnés à leurs talents & à leurs forces, les citoyens à leur tour doivent être diftingués & favorifés à proportion de leurs fervices. C'eft en ce fens qu'il faut entendre un paffage d'Ifocrate, dans lequel il loue les premiers Athéniens d'avoir bien fu diftinguer quelle étoit la plus avantageufe des deux fortes d'égalité, dont l'une confifte à faire

R

tous

part des mêmes avantages
à
les citoyens indifféremment, &
l'autre à les diftribuer felon le
mérite de chacun. Ces habiles:
politiques, ajoute l'Orateur, ban-
niffant cette injufte égalité, qui
ne met aucune différence en-
tre les méchants & les gens de
bien, s'attacherent inviolablement
à celle qui récompenfe & punit
chacun felon fon mérite. Mais
premierement, il n'a jamais exifté
de fociété, à quelque degré de
corruption qu'elles aient pu par-
venir, dans laquelle on ne fît au-
cune différence des méchants &
des gens de bien ; & dans les
matieres de mœurs, où la loi ne
peut fixer de mefure affez exacte
pour fervir de regle au Magiftrat,
c'est très-fagement que, pour ne
pas laiffer le fort ou le rang des
citoyens à fa difcrétion, elle lui
interdit le jugement des perfon-
nes, pour ne lui laiffer que celui
des actions. Il n'y a que des mœurs

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auffi pures que celles des anciens Romains qui puiffent fupporter des Cenfeurs; & de pareils tribunaux auroient bientôt tout bouleverfé parmi nous. C'est à l'eftime publique à mettre de la différence entre les méchants & les gens de bien le Magiftrat n'eft juge que du droit rigoureux; mais le peuple est le véritable juge des mœurs; juge integre, & même éclairé fur ce point, qu'on abufe quelquefois, mais qu'on ne corrompt jamais. Les rangs des citoyens doivent donc être réglés, non fur leur mérite perfonnel, ce qui feroit laiffer au Magiftrat le moyen de faire une application prefque arbitraire de la loi, mais fur les fervices réels qu'ils rendent à l'Etat, & qui font fufceptibles d'une eftimation plus exacte.

FIN.

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